Barbie Etats-Unis 2023 – 114min.

Critique du film

Féminisme grand public

Critique du film: Colin Schwab

Résolument plus grand public et tourné vers la comédie que les deux premiers long-métrages de Greta Gerwig, Barbie tente de combiner film mainstream et idées féministes, mais n’y arrive qu’à moitié.

Barbie (Margot Robbie) habite à Barbie Land, monde idyllique où vivent tous les autres modèles de Barbie et de Ken, où la peur et l’anxiété n’existent pas et où chaque jour est le même. La dynamique entre les genres y est différente : les femmes occupent toutes les positions de pouvoir, les hommes ne sont intéressés que par le surf et par réussir à attirer l’attention d’une Barbie. Mais des pensées noires, existentielles, viendront soudainement parasiter le cerveau de la poupée et faire disparaitre le bonheur millimétré de ce monde artificiel. Une quête vers la source de ce malaise et vers le monde réel commence alors.

Dans un premier temps, le long-métrage de la réalisatrice américaine nous donne de quoi jubiler : des décors impressionnants – l’univers Barbie recréé de toutes pièces à taille humaine – rempli d’acteur·ice·s convaincant·e·s et d’un humour absurde souvent très efficace. En bref, un univers de plastique, étrange mais vraisemblable, auquel l’on donne vie avec succès.

Il est aussi réjouissant, d’un point de vue plus général, qu’un film autant mainstream, à la stratégie marketing si stratosphérique, soit orienté intégralement autour de questions féministes. Car le film questionne efficacement l’état des rapports femme-homme sur terre en se plaçant du point de vue de Barbie, qui les découvre lorsqu’elle visite notre monde pour la première fois. Il invite alors les nombreux·ses spectateur·ice·s – car il est certain que des millions de personnes iront le voir en salle – à s’étonner également de ces dynamiques, tout en essayant toujours de rester divertissant et drôle.

Mais cette tendance à vouloir toujours divertir est sans doute l’élément qui gêne le plus face à Barbie : courses poursuites, scènes de combat et autres séquences de comédie musicale, le film cherche absolument à faire du spectacle. Malheureusement, ces séquences détonnent avec le reste du film tant elles sont injustifiées et inutiles au sein du récit. Elles donnent en fait l’impression d’être des petits susucres que l’on distribue aux spectateur·ice·s pour ne pas les perdre et pour que les instants de discussion autour du genre leurs soient supportables. En plus d’être pauvre esthétiquement – ce n’est là clairement pas le domaine de prédilection de Gerwig – elles créent des ruptures qui finissent par empiéter sur la cohérence de l’œuvre et par nous faire sortir de son univers, pourtant bien pensé.

De manière plus générale, la pauvreté esthétique, la banalité formelle de ce long-métrage étonne et déçoit : Gerwig avait su développer un langage lui étant propre dans ses deux premières œuvres, force est de constater qu’il est ici absent. Il est alors difficile d’accepter que, dans son film le plus explicitement féministe, la voix, l’identité de la réalisatrice disparaisse au profit d’un discours esthétique aseptisé. Barbie nous confirme que, même pour les meilleur·e·s réalisateur·ice·s de leur génération, faire un film mainstream traitant d’oppression sociétale sans se laisser aller à de gros paradoxes reste un défi encore difficilement surmontable.

24.07.2023

2.5

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Commentaires

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georges511

il y a 7 mois

Une bouffée d'air pur et frais n'en déplaise aux MACHIS DE MES 2
Voici une œuvre intelligente, avec un scénario crescendo, des questions sociétales cruciales encore +aujourd'hui qu'hier
Rien ne change vraiment dans ces carquants machistes puanrs qui traitent la femme du 21e siècle encore pire qu'il y a 50 ans

Les preuves :dans les pays religieux, comme par hasard le monde du travail encore beaucoup trop régi par L'HOMME dans toute sa splendeur et décadence puantes à l'excés.

Enfin bref vivement un monde libéré des idéologies machistes, dictées par des religieux fanatiques tout comme le patriarcat en général car sous le soit disant changement et prise de conscience masculine gronde plus que jamais la haine et LA PEUR QUE LA FEMME INSPIRE À TOUTES CES COMMUNAUTÉS RELIGIEUSES, ET J'INSISTE LÀ DESSUS CAR TOUT VIENT DE LÀ ET DES CROYANCES, DES ÉCRITS D'HOMMES D'UN AUTRE ÂGE (BIBLE, ETC) ,

C'est pour ça que nous tou.t.e.s devons nous battre encore plus afin que l'homme et son fonctionnement fassent un rétropédalage plus que salutaire pour toutes les femmes, filles, jeunes hommes, garçons du monde entier

VOILÀ LA SEULE ET UNIQUE VOIE À SUIVRE CELLE DU CŒUR

MESSIEURS IL EST TEMPS QUE NOUS PRENIONS NIS RESPONSABLILTÉS D'êtres humains et non d'hommes.
Ouvrons et set écoutons beaucoup plus nos ♥️❤️💕🤗💗💓 au lieu de nos têtes
CQFD

Et ça changera toutVoir plus


Eric2017

il y a 8 mois

Durant les premières 20 minutes j'ai failli me lever et quitter la salle. C'était ennuyeux au possible et le nom de Barbie me sortait déjà par les oreilles. J'avais le sentiment de n'entendre que ce prénom...et pas d'autres dialogues. Bref, c'est l'idée de cette "membrane" franchie entre le monde irréel au réel qui m'a interpelé et qui a fait que je suis resté durant le 80 autres minutes. Bonne idée ce qui amène a une réflexion sociale sur la place des hommes et des femmes. Maintenant je doute que les enfants aient vraiment compris le message. Margot Robbie est parfaite et Ryan Gosling est très bien mais kitch, mais c'est Ken, donc..... Dans tous les cas ce film n'est pas un chef d'oeuvre, même si les entrées tenteront à nous faire croire le contraire. (F-07.08.23)Voir plus


CineFiliK

il y a 8 mois

“La vie en rose”

Qu’il fait bon vivre à Barbieland, matriarcat construit sur du plastique fuchsia. Mais il y a quelque chose de pourri dans le royaume. En pleine crise existentielle, Barbie pense à la mort, remarque de la cellulite sur ses cuisses et se retrouve un matin avec les pieds plats. Beurk ! Elle n’a plus le choix. Il lui faut chausser des « Birkenstocks » et trouver la raison de son malheur dans le monde réel.

Un film sur la célébrissime poupée mannequin ? Le regard a priori s’en détourne. Mais quand le casting se joue entre Margot Robbie et Ryan Gosling, duo talentueux et pas insensible au cinéma indépendant, un œil s’ouvre grand. Puis quand apparaît le nom de Greta Gerwig en tant que réalisatrice, on se dit qu’il y a « une louve ». La Lady Bird aux commandes, secondée par son partenaire de choix Noah Baumbach, ne laissera certainement pas au vestiaire son atypisme et ses élans féministes pour jouer à la poupée. La maison-mère n’a qu’à bien se tenir…

Nous voilà confortés dès la scène inaugurale, pastiche de 2001, l’odyssée de l’espace. Sur la fameuse musique de Strauss, les fillettes cajolant leurs poupons de cire ou de porcelaine ont remplacé les singes. Tel le monolithe noir, la première Barbie, géante, leur apparaît coiffée et habillée comme à l’époque. Un clin d’œil suffit à leur faire comprendre que leur destinée ne se résume pas à devenir mère. Docteure, astronaute, cheffe de chantier, éboueuse, présidente ou prix Nobel, c’est un arc-en-ciel inclusif de possibles qui s’offre à elles désormais. Mais dans le vrai monde, en proie aux anxiolytiques, les dimensions surréelles de la Pink Lady finissent par créer mal-être et frustrations. Dans un argumentaire implacable, Barbie se voit démolie et traitée de « facho ». Quant à Ken, son bouffon, il y découvre l’origine du mâle. Une nouvelle guerre des sexes est-elle à déclarer ?

En équilibre sur une corde raide tendue entre hommage appuyé et déstructuration du mythe, Gerwig évite la chute. Son mélange de kitsch délicieusement provocant – comment aborder par exemple l’absence des parties génitales de la poupée ? – donne au film un goût de bonbon acidulé. Bourré de références pas toujours saisies, musical, drôle et impertinent, il permet à Mattel de faire l’étalage de ses produits tout en jouant à fond la carte de l’autodérision. Avec Will Ferrell au sommet de la tour, difficile de garder son sérieux. Bénéficiant d’un marketing monstrueusement efficace, Barbie, ringardisée il n’y a pas si longtemps, redevient un phénomène de masse. On connaît la chanson et se laisse bercer par ces belles paroles : « Oh la la la vie en rose. Le rose qu’on nous propose… Que des choses ‘très’ commerciales. »

(7/10)Voir plus

Dernière modification il y a 8 mois


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