Kritik12. März 2024

«Il reste encore demain» de Paola Cortellesi, fronde contre les violences faites aux femmes

«Il reste encore demain» de Paola Cortellesi, fronde contre les violences faites aux femmes
© Morandini Film Distribution

Le film phénomène de Paola Cortellesi débarque en Suisse romande. En noir et blanc, il dépeint le quotidien à peine croyable d'une mère de famille dans la Rome machiste d'après-guerre.

(Une critique de Marine Guillain)

Film le plus vu en Italie depuis la pandémie, avec quelque 5 millions de spectateurs.rices (c’est davantage que pour «Oppenheimer», de Christopher Nolan, et «Barbie», de Greta Gerwig), «Il reste encore demain» («C'è ancora domani» en vo) s'est mué en véritable phénomène depuis sa sortie, le 26 octobre dernier. Il faut dire que le long métrage de la grande actrice populaire, humoriste, présentatrice de TV et désormais réalisatrice Paola Cortellesi fustige le patriarcat et les violences conjugales avec force, à un moment où cette thématique semble tristement plus que jamais d'actualité. Peu après la sortie du long métrage, une jeune femme de 22 ans, Giulia Cecchettin, a été assasinée à coups de couteau par son ex-petit ami. Ce fait divers, 106e féminicide en 2023 en Italie, a rassemblé des milliers de personnes dans la rue et «Il reste encore demain» est venu renforcer la lutte.

À mi-chemin entre le drame et la comédie, le long métrage remonte le temps en noir et blanc et plonge dans les années 1940, juste après la fin de la Seconde Guerre mondiale, peu avant que les femmes n’obtiennent le droit de vote. Délia (Paola Cortellesi elle-même) vit dans un appartement miteux d’un quartier pauvre de Rome, avec ses trois enfants et son mari violent, Ivano, qui la cogne régulièrement. Cette mère de famille aussi pauvre que déterminée cumule les petits boulots, tentant de mettre un peu d’argent de côté pour un projet que son mari ne doit pas connaître. Outre la brutalité de ce dernier, celle de la société en général, plus insidieuse, et la domination masculine, se trouvent dans chaque recoin de son quotidien.

«Il reste encore demain» de Paola Cortellesi © Morandini Film Distribution

La photographie et les décors offrent une véritable plongée dans l’époque d’après-guerre. En y ajoutant les excellentes performances des comédiens et comédiennes, le film, sur certaines scènes, tend brillamment vers le documentaire. Ceci étant, la première chose qui marque dans «Il reste encore demain», c’est que Paola Cortellesi ose la comédie et la légèreté pour s'empoigner du sujet. Ainsi, une atroce scène de violence conjugale se transforme en danse chorégraphiée injectée de poésie sur une musique guillerette.

Rendant la situation encore plus choquante et dramatique? Oui, probablement. À travers ses excès (notamment des scènes surjouées), le long métrage prend par moments de faux airs de télénovela, ce qui renforce à la fois le malaise et l’intérêt de voir ce sujet traité avec autant de légèreté, parfois semble-t-il même de détachement. Finalement, la capacité de Delia à oser penser à un avenir meilleur - et pas uniquement pour elle - sera le seul salut de cette histoire si pesante et déchirante qu’elle en devient difficile à supporter.

3,5/5 ★

Plus d'informations sur «Il reste encore demain»

Bande-annonce de «Il reste encore demain»

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