Critique8. November 2023

GIFF 2023 : «Captives», le dernier bal des folles

GIFF 2023 : «Captives», le dernier bal des folles
© cineworx

Arnaud des Pallières revient à la fiction avec «Captives», une œuvre au féminin dans l’univers de la psychiatrie de la fin du XIXe siècle.

(Une critique de Kilian Junker depuis le GIFF 2023)

1894, Fanni (Mélanie Thierry) feint la folie pour se faire enfermer dans l’hôpital psychiatrique de la Salpêtrière, à la recherche de sa mère dont elle a perdu la trace il y a déjà des années. Gardée par l’intransigeante gardienne surnommée La Douane (Marina Foïs) elle-même aux ordres d’une très rigide cheffe de clinique (Josiane Balasko), Fanni va découvrir cette communauté à part, où les cas psychiatriques côtoient des femmes que l’on enferme là simplement pour les mettre au ban de la société. Tandis que le dernier grand bal de la Salpêtrière se prépare, Fanni remue dans le passé sombre de cette institution…

L’histoire de ce tristement célèbre évènement où le docteur Charcot exhibait ses «bêtes» à la société mondaine parisienne a déjà fait l’objet de plusieurs explorations cinématographiques, dont le récent «Le Bal des Folles» par Mélanie Laurent. Ici, Arnaud de Pallières choisit de coller au point de vue de son héroïne principale, tout à fait saine d’esprit, qu’il propulse dans l’univers glauque et 100% féminin de cet hôpital psychiatrique. Et le premier problème de ce «Captives» est l’absence totale de spatialisation : la caméra attachée au point de vue de Mélanie Thierry, sous la modalité quasi-constante du gros-plan, ne laissera jamais vivre son environnement et privera le spectateur de toute notion de situation physique des différentes protagonistes. Fanni est sans doute perdue dans cet hôpital, mais le public l’est d’autant plus, ce qui n’aide pas à son immersion au sein de l’histoire…

Ce choix de confusion spatiale se corrèle à un filmage déroutant, composé d’une shaky cam ballottant son spectateur dans une image constamment parasitée d’effets de zooms et d’un montage épileptique. Bref, Arnaud de Pallières semble adopter tous les codes visuels du film d’action antithétique à l’œuvre historique plutôt bavarde qu’il réalise. En résulte des plans qui n’ont que peu de temps pour vivre, frustrant un spectateur jamais libre de fouiller du regard ce qui se joue devant lui. Fort heureusement, quelques sursauts documentaires (Arnaud des Pallières est un documentariste accompli) offrent parfois une bouffée d’authenticité à un récit qui en manque cruellement. Restera de «Captives» l’histoire, absolument sidérante, du traitement réservé aux femmes qualifiées de folles à l’époque, et une interprétation plus que convaincante d’un casting particulièrement bien choisi…

2/5 ★

Au cinéma le 7 février 2024.

Plus d'informations sur «Captives».

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