Critique26. April 2023

Critique de «Toute la beauté et le sang versé», deux artistes et un documentaire d'exception

Critique de «Toute la beauté et le sang versé», deux artistes et un documentaire d'exception
© 2023 Filmcoopi

Né de la rencontre entre Laura Poitras et Nan Goldin, «Toute la beauté et le sang versé» est tout bonnement sublime. Un documentaire à découvrir au cinéma à partir du 26 avril.

(Une critique d'Eleo Billet)

Deux artistes. L’une s’appelle Laura Poitras, réalisatrice acclamée pour ses documentaires sur des lanceurs d’alertes. L’autre se nomme Nan Goldin, photographe mondialement connue qui n’a, de sa vie, jamais cessé d’être en lutte. De leur rencontre surgit «Toute la beauté et le sang versé», un documentaire récipiendaire du prestigieux Lion d’or à la dernière Mostra de Venise.

Nan Goldin, figure incontournable du milieu artistique underground new-yorkais, dès la fin des années 70, est aujourd’hui exposée dans les plus grands musées. Il fut un temps où Goldin découvrait la photographie entre deux fugues de maisons d’accueil. Il fut un temps où son travail était présenté à côté du nom de la famille Sackler, à la tête de Purdue Pharma, qui commercialise l’OxyContin, responsable de la crise des opioïdes aux États-Unis. Aujourd’hui, le combat continue et Nan Goldin n’est pas seule.

Passé(s) et présent, souvenirs aux couleurs saturées, vidéos et photographies s’entremêlent pour construire un miroir et faire dialoguer sur plus de 60 ans les éclats de vie de celle qui veut faire éclater la vérité. Sur le suicide de sa sœur d’abord, et les conséquences du déni de sa souffrance, de la violence familiale et de l’être queer. Une sœur aînée qui lui a montré la voie de la libération à travers l’art, dont la mémoire, tel un fantôme, apparaît par endroits et nous aspire dans les œuvres de la photographe.

Critique de «Toute la beauté et le sang versé», deux artistes et un documentaire d'exception
«Toute la beauté et le sang versé» © 2023 Filmcoopi

Contre la violence systémique ensuite. Constamment, des liens exacerbés sont tissés entre les activistes de P.A.I.N, qui veulent mettre fin à la stigmatisation des personnes addictes et à l’omerta sur la famille Sackler, et les militant.e.s d’Act-Up, en colère et impuissant.e.s face à la mort de leurs proches du sida. Goldin, elle, résiste et photographie ses sujet-ami.e.s, sa propre vie en centre de désintox ou battue par son compagnon. Ses photos inspirent, elles redonnent un corps, une existence à toustes celleux qui sont parti.e.s.

Chapitré d’après le titre des diaporamas de Goldin, le documentaire est le fruit d’une puissante collaboration entre Laura Poitras, son sujet, mais aussi les archives d’autres artistes. Les témoignages des familles endeuillées se succèdent, jusqu’à l’étouffement, dans cette œuvre, qui laisse le public en larmes devant un trop-plein d’injustices capturées par la caméra. Il s’achève d’ailleurs sur cette simple prière « Réduire les préjudices ».

4,5/5 ★

À découvrir dès le 26 avril au cinéma.

Plus d'informations sur «Toute la beauté et le sang versé»

Bande-annonce de «Toute la beauté et le sang versé»

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