Critique27. Januar 2022

«Nos âmes d'enfants» - Un voyage sonore et initiatique avec Joaquin Phoenix

«Nos âmes d'enfants» - Un voyage sonore et initiatique avec Joaquin Phoenix
© Pathé Films AG

Un journaliste radio entame un voyage avec son jeune neveu. Dans «Nos âmes d'enfants», le cinéaste Mike Mills dévoile un film d’une profonde délicatesse où se révèle toute l’élégance de sa distribution.

Nommé à l’Oscar du meilleur scénario en 2017 pour «20th Century Women», Mike Mills dévoile ici son quatrième long-métrage. Nos âmes d'enfants, C’mon C’mon en version originale, propose une élégante pellicule en noir et blanc pour accompagner la poésie ordinaire d’un mélodrame familial. Peu de chose en définitive, c'est un bout d’histoire comme il y en a tant d’autres ; celle d’une mère qui élève son fils seule alors que son ex-conjoint perd pied, et celle d’un petit ange, du moins un Phoenix, qui vient prêter main forte à sa sœur.

Et puis, il y a l’art et la manière de raconter ces quotidiens singuliers, de les jouer aussi. La formidable Gaby Hoffmann (notamment croisée dans la série «Transparent») prête son aura délicate à cette mère, artiste et écrivaine. Elle qui s’efforce de maintenir à flot un foyer qui déborde de l’amour qu’elle porte à son fils. Mais ni les partitions merveilleuses au piano d’Emahoy Tsegue Maryam Guebrou, ni les requiems qu’ils connaissent sur le bout des doigts, pas même l’étonnant petit jeu de l’orphelin qu’ils jouent chaque soir au moment du coucher, rien ne camoufle moins l’absence. Du haut de ses neuf ans, le jeune Woody Norman digère la séparation parentale, et de ne comprendre l’aliénation de son père (incarné par Scoot McNairy), Jesse libère une énergie débordante.

C’est sur ce terrain malhabile que Jesse rencontre son oncle, un tendre Joaquin Phoenix un peu empoté et qui sort tout juste d’une rupture amoureuse. Comme deux petits princes, une alchimie immédiate unit les acteurs, et nous voilà portés dans une valse réconfortante sur la filiation, l’enfance. À l’image de cette bande-annonce magnifique où Joaquin Phoenix lit un passage du livre «Star Child» de Claire A. Nivola, Nos âmes d'enfants est écrit comme une pensée de velours.

Mike Mills et Joaquin Phoenix sur le tournage de «Nos âmes d'enfants» Woody Norman et Joaquin Phoenix dans «Nos âmes d'enfants» Gaby Hoffmann et Woody Norman dans «Nos âmes d'enfants» Mike Mills et Joaquin Phoenix sur le tournage de «Nos âmes d'enfants»

Sorte de «Sunburn» solaire et téméraire à la «Mid90s», Jesse ne cesse de lui échapper ; un oncle ne remplace pas un père, et encore moins une mère, et pourtant. Avec son casque sur les oreilles, l’enfant se calme et découvre émerveillé la prise de son sur les plages de Los Angeles, puis dans les skateparks, à New-York dans Chinatown et aux pieds du Manhattan Bridge (des décors formidablement capturés par la caméra de Robbie Ryan).

La poésie ordinaire d’un mélodrame familial...– Théo Metais

Le micro devenant cet outil privilégié pour appréhender le monde, capturer l’éphémère, et enregistrer ses confidences. Et cela aurait presque suffi à être beau, mais à l’orée du documentaire, Mike Mills superpose le récit de ce duo extraordinaire, aux témoignages de ces jeunes enfants rencontrés à Detroit, à New York, et en Nouvel Orléans.

Woody Norman dans «Nos âmes d'enfants» Gaby Hoffmann et Joaquin Phoenix dans «Nos âmes d'enfants» Woody Norman et Joaquin Phoenix dans «Nos âmes d'enfants»

Ainsi «Nos âmes d'enfants» questionne le futur et permet de rendre aux êtres ce qu’ils ont d’humain, de vulnérable, et de valider le cœur et ses humeurs face à l’imprévisible de l’existence. Un peu méta, le micro(scopique) rencontre l’immense, et dévoile une fable contemporaine, urbaine et journalistique qui étudie les villes et ses fourmis étonnantes. Après ses «Beginners» et «20th Century Women», Mike Mills, lui-même devenu parent, confie entre les lignes de sa pellicule, son incapacité à expliquer le monde en des termes simples.

Le cinéma servira d’excuse à une étude un peu vague, lyrique, diffuse et atmosphérique. Peut-être faudra-t-il simplement apprécier la sincérité émouvante de Joaquin Phoenix en tandem avec un Woody Norman. «Nos âmes d'enfants» est ce conte initiatique où les serpents digèrent des éléphants grands comme un songe.

4/5 ★

Depuis le 26 janvier au cinéma.

Plus d'informations sur «Nos âmes d'enfants».

Bande-annonce

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