Critique26. April 2023

Critique de «Quand tu seras grand», une douce plongée dans une maison de retraite pas comme les autres

Critique de «Quand tu seras grand», une douce plongée dans une maison de retraite pas comme les autres
© Agora Films

Quand tu seras grand s’inscrit dans la liste toujours plus importante des comédies dramatiques françaises prenant place dans le cadre d’institutions sociales (foyer pour jeune, centre d’accueil pour femmes sans abri). Aux dépens des longs-métrages inégaux de Louis-Julien Petit («La Brigade»,«Les Invisibles»), Andrea Bescond et Éric Métayer trouvent, avec leur film, un joli équilibre.

(Une critique de Colin Schwab)

Yannick (Vincent Macaigne) est aide-soignant dans un home pour personnes âgées défaillant : en manque de moyens financiers, d’effectif, les employé·e·s, à bout de souffle, effectuent constamment des heures supplémentaires. Une situation qui se compliquera plus encore alors que les résident·e·s de l’institution devront partager leur cafétéria avec des enfants et leurs encadrant·e·s, venu·e·s d’une école alentour. Une fougue juvénile qui changera drastiquement la dynamique du home.

Pour structurer l’intégralité de leur récit, Andrea Bescond et Éric Métayer auraient tout à fait pu exploiter le potentiel de la complexe conciliation entre ces deux générations que tout oppose. Une situation conflictuelle agencée autour d’une seule et même question, d’un seul enjeu – la cohabitation finira-t-elle par aboutir ? : la recette parfaite d’un scénario divertissant.

Mais, étonnement, nos scénaristes décident de régler, de dépasser ce conflit très rapidement. Yannick, d’abord réfractaire à l’idée de la cohabitation, reconnaîtra rapidement ses vertus et laissera Aude (Aïssa Maïga) – accompagnatrice des élèves – organiser des ateliers pour que les deux générations entrent d’autant plus en interaction.

© Agora Films

Plus que dans leurs oppositions, c’est alors dans leurs similarités que ces deux sphères seront abordées. Espaces situés aux deux extrémités du temps vécu humain, en dehors du monde du travail, il y existe une naïveté semblable face au monde, une joie de vivre simple, où faire communauté semble plus facile.

Alors, dans sa forme, le film concilie également des mondes semblablement opposés : entre modalités de représentations associées aux films d’auteurs – plans longs – et celles de films plus grand public – scènes clipesques – c’est un mélange pertinent, dans une forme efficace d’entre-deux, que le film se trouve.

En soulignant la facilité que jeunes et vieux ont à faire communauté, l’absence totale de cohésion entre les individus insérés dans le marché du travail nous est soudain d’autant plus visible. Le travail pour des institutions d’État y est aliénant, usant. Le manque de financement, donc de temps et d’énergie du corps encadrant, provoquera la mort précipitée de certain·e·s usager·e·s.

Ce désespoir propre au monde du travail est exploité dans son potentiel dramatique au sein de scènes flirtant, malheureusement, avec le pathos. Mais, bien qu’il succombe parfois à sa teneur dramatique, le film propose également de quoi résister à ce désespoir. Car, de bien des manières – par sa tendresse, mais aussi en n’étant pas agencé autour d’un seul et unique personnage ou d’une seule question – «Quand tu seras grand» fait communauté, érige cette forme d’organisation comme facteur d’émancipation.

4/5 ★

À découvrir aujourd'hui au cinéma.

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Bande-annonce de «Quand tu seras grand»

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