Artikel9. April 2020

Disney+: Ces 3 films Disney qui ne passeraient plus aujourd’hui

Disney+: Ces 3 films Disney qui ne passeraient plus aujourd’hui
© 1941 - Walt Disney Productions

Disponible en suisse romande depuis peu, Disney+ a mis en ligne un catalogue gorgé de classiques. Mais saviez-vous que parmi nos tendres madeleines d’enfance, se sont glissées des scènes à connotations raciales péjoratives. Sur la plateforme, certains films sont accompagnés de la très vague mention: “représentations culturelles dépassées”. Alors voici 3 films Disney qui ne passeraient plus aujourd'hui, et on vous dit pourquoi!

1 - «Dumbo» (1941)

Si la récente version de Tim Burton ne manquera pas de corriger la pellicule originelle de ses frasques, le «Dumbo» de 1941 pose en effet problème à bien des égards. Si la scène du trip surréaliste a déjà fait couler beaucoup d’encre, c’est une autre scène qui nous intéresse ici. Une scène dans laquelle on aperçoit des travailleurs noirs représentés comme des corps spectraux, déshumanisés car sans visage pareil à des animaux, trimant comme des éléphants sous des trombes d’eau pour monter le chapiteau du cirque. La scène est diffusée sur Disney+ dans sa forme originale et accompagnée d’un message sur la plateforme parlant de “représentations culturelles dépassées”.

Le nom du corbeau à cigare renvoie aux lois Jim Crow qui désignent un ensemble de règles de la ségrégation raciale aux États-Unis.
© 1941 - Walt Disney Productions

Et ce n’est pas tout car «Dumbo» cumule. En effet, un autre personnage pose problème, le corbeau au cigare, le fameux Jim Crow, celui-là même qui demande à l’éléphanteau et Timothy Q. Mouse de décamper de son arbre. Le nom de Jim Crow est justement tiré de la chanson «Jump Jim Crow», chanson interprétée par Thomas Dartmouth (“Daddy”) Rice, un artiste qui chante et danse en blackface au milieu du 19ème siècle. Voilà qui aurait suffi à sceller «Dumbo», or le nom du corbeau renvoie aussi aux lois Jim Crow qui désignent un ensemble de règles majeures de la ségrégation raciale aux États-Unis, notamment la ségrégation dans les écoles et les lieux publics en vigueur jusqu’en 1954.

2 - «Peter Pan» (1953)

Passons au cas «Peter Pan», car le classique ne manque pas de stéréotypes quand il s’agit de représenter les natifs américains. Première coquille, le personnage de Tiger Lily, la “princesse indienne”, une aberration dans les termes, car le concept même de “princesse” n’est pas inhérent à la culture des natifs américains. Alors elle est la fille du chef indien, une princesse selon les standards de l’homme blanc, or le terme est considéré comme particulièrement dégradant. En effet, il souligne la supériorité, sinon le mépris de la culture blanche (et donc des studios à la sortie du film) pour la culture des natifs américains, pensant que leurs schémas s’appliquent de manière universelle, qu'ils sont régulés par les mêmes principes: jeune et naïve, en péril et dessinée selon les mêmes standards de beauté.

Enfin quand Peter Pan et sa clique sont invités à fumer le calumet de la paix, la scène de la grande réunion au coin du feu dérange. Une scène, qui non seulement singe le langage des signes instruit par le grand chef indien, fait parler la tribu dans un anglais très approximatif, et qui n’a rien à envier au langage “petit-nègre”, et qui, en version originale, emploi le terme “injun”. L’expression viendrait d’une confusion maladroite avec le terme “indian” et historiquement elle pose problème car elle aurait été employée pour parler d’un “honnest indian”. Aujourd’hui le terme est largement considéré comme dégradant. Notons par ailleurs que “injun” est employé par la tribu elle-même, comme si l’erreur de l’homme blanc faisait désormais partie de leur patrimoine. Voilà un autre symbole en dilettante de la suprématie blanche dans le «Peter Pan» de 1953. Par ailleurs la traduction audio en français disponible sur Disney+ propose la formule “indien”.

3 - «La Petite Sirène»

Qui l’eut cru, «La Petite Sirène» n’est pas en reste, ou plus exactement les paroles de la chanson “Sous l’océan”, chantées par le personnage du crabe Sebastian. Une chanson qui prône une vie tranquille, décomplexée, au fil de l’eau, à contrario de la vie en surface “Là-haut, ils bossent toute la journée, Esclavagés et prisonniers.”. Jusque-là tout va bien, or la chanson se mêle à l’accent jamaïcain caricatural de Sebastian (Samuel E. Wright en VO), certains verront, de la part de Disney, la volonté de mettre en avant l’éternelle rengaine stéréotypée de la “fainéantise” jamaïcaine.

Aussi dans ce même passage, un poisson furtif se balade innocemment sous les eaux, et propose en fond quelques envolées vocales jazzy. Un poisson facilement identifiable dans les paroles originales puisqu’elles parlent du “blackfish” (“The blackfish she sings.” entendra-t-on en VO, “Le thon garde le ton.” dans la version française). Un poisson qui, mangé de lèvres bien trop pulpeuses pour être innocentes et accompagné d’une démarche dansante, certes, mais un peu gauche, laisse en effet un arrière-goût amer à la caricature lorsqu’elle use des stéréotypes péjoratifs comme d’un ressort comique.

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