Critique4. Januar 2022

«En attendant Bojangles» - La valse des âmes esseulées

«En attendant Bojangles» - La valse des âmes esseulées
© Pathé Films AG

Adaptation du roman éponyme d’Olivier Bourdeaut, Régis Roinsard entame 2022 avec une histoire d’amour fou sur un air emprunté à Nina Simone. Le cinéaste fait se rencontrer un tandem endiablé porté par Virginie Effira et Romain Duris dans une valse sentimentale effrénée, kitsch et (presque) réconfortante.

Camille (Virginie Effira) rencontre Georges (Romain Duris) sur la Riviera en 1958 au milieu des mondanités de celles et ceux qui pavanent. La flamme est immédiate et le mariage ne tarde pas. Une imagination débordante habite ce duo qui s’invente mille et une histoires pour conjurer le triste sort des réalités ordinaires. De leur amour naîtra un jeune prodige, Gary (Solan Machado-Graner), haut comme trois pommes et déjà formidable conteur. En témoignent leurs amitiés particulières et leur verve en prose, Camille et Georges ont construit une idylle raffinée, sensible, au pays des libres penseurs et des ayatollahs du verbe.

Succès en librairie en 2016 pour le premier roman de l’écrivain Olivier Bourdeaut, s’ensuit une myriade de prix, alors l’adaptation ne pouvait plus tarder. Et c’est au cinéaste Régis Roinsard de s’y atteler, lui à qui l’on devait «Populaire» en 2012, une aventure dactylographique avec Romain Duris, déjà. Fidèle au décorum des années 50 qu’il chérit tant, le réalisateur dévoile Virgine Effira à Romain Duris dans une «assemblée de croque-morts» comme ils disent, face à l’horizon d’huile et turquoise de la Riviera. Il prétend être un cavalier prussien et avoir inventé le harpon à mouche, il se moque de tout et elle lui rend si bien. Leur romance porte bien des noms, eux aussi, «marions-nous tout de suite ou nous allons oublier» entendra-t-on !

Un ton curieusement nostalgique...– Théo Metais

«Quand la réalité est banale et triste, inventez-moi une belle histoire» une formule à lire en 2016 et à entendre dans ce film. Un mantra pour cette famille qui vit comme les personnages de roman d’une certaine époque. Une union dansante, virevoltante, pour deux tourtereaux solaires racontée par le fils dans le livre. Ici, Régis Roinsard prend des libertés, s’émancipe de la structure initiale et entame son récit par les élucubrations du père. Virginie Effira et Romain Duris continuent de composer une cinématographie éclectique, et se donnent joliment la réplique dans ce registre, à l’image d’un excellent Grégory Gadebois dans la peau de «l’Ordure» et d’un surprenant Solan Machado-Graner.

«En attendant Bojangles» - La valse des âmes esseulées
Virginie Effira, Romain Duris, Solan Machado-Graner et «Mademoiselle Superfétatoire» dans «En attendant Bojangles» © Pathé Films AG

Un frémissement poétique, certes, et qui n’est pas sans rappeler le nénuphar de Boris Vian, et l’univers de Romain Gary. Une quête de sagesse au milieu du farfelu alors que pointent leurs nez les anges sombres de la démence. «En attendant Bojangles» se teinte du charme des années folles et se fait le doux récit de cette vie singulière, mais sans doute aurait-il fallu laisser la parole à l’enfant. Aussi rayonnante et minutieuse soit la mise en scène, cette version dévoile un ton curieusement nostalgique lorsqu’elle appuie sur l’insondable spleen à la française.

Virginie Effira et Romain Duris (...) se donnent joliment la réplique...– Théo Metais

Avec une morale abrupte et sans issue, pas sûr non plus que cette vision du couple et de leurs fantaisies (lettrées), ne soit complètement moderne ni inspirante. Et aussi réjouissante soit la première partie, Régis Roinsard termine son métrage certainement trop tard. Mais si vous aussi il vous arrive, parfois, d’oublier la fin des films et des romans, alors peut-être qu’«En attendant Bojangles» aura de quoi vous plaire.

3/5 ★

Le 5 janvier au cinéma. Plus d'informations sur «En attendant Bojangles».

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