Critique26. März 2024

FIFF 2024: «Cuadrilátero», famille nucléaire au bord de l’explosion

FIFF 2024: «Cuadrilátero», famille nucléaire au bord de l’explosion
© FIFF

Présenté en première mondiale lors de la dernière édition du FIFF, «Cuadrilátero» du péruvien Daniel Rodríguez Risco est un film aussi corrosif dans son humour que dans sa dénonciation du conformisme qui ronge la classe moyenne.

(Une critique d'Eleo Billet depuis le FIFF 2024)

Adriana (Lizet Chavez), son mari et leurs deux enfants ne font jamais rien l’un sans l’autre. Quatre assiettes sur la table, quatre verres remplis à la même hauteur, quatre places dans leur voiture constituent leur quotidien. La grossesse d’Adriana va alors bouleverser le précieux équilibre. Surtout lorsque le dernier-né réclame sa place dans la famille. Sera-t-il possible de revenir en arrière ou leur faudra-t-il mener une vie à cinq ?

Il y a tant à saluer dans le nouveau film de Daniel Rodríguez Risco, qui mérite amplement son prix spécial du Jury au FIFF. Reprenant le thème de la grossesse de son El Vientre (2014), ici non désirée, le réalisateur interroge, par ses décors à la précision redoutable, les limites de la famille nucléaire. Son obsession pour la précision et l’ordre se retranscrit dans les gestes synchronisés et les expressions faciales des personnages, vidées de toute âme, toute émotion.

En quasi-huit-clos, dans cette belle maison à la piscine d’un bleu irréel, se déroule pourtant le drame humain de l’égoïsme et de l’exclusion. La tension est finalement moins issue de la grossesse en elle-même que de l’arrivée de l’enfant disruptif, symbolisée par sa naissance, stérilet en main. Si «Cuadrilátero» manque parfois de subtilité dans sa morale, ce défaut, en apparence seulement, n’en est pas un, tant le film reste grotesque et explicite dans le reste de sa démonstration. La philosophie qu’il combat est ainsi amplement illustrée par les livres, tous identiques, d’Ayn Rand, que lisent les enfants du couple.

Composé de nombreuses scènes où l’intérêt réside dans le défilé de visages ou de corps qui se superposent dans leurs répétitions, «Cuadrilátero» est un film où la mise en scène statique a toute sa place. Comment mieux représenter l’enfermement de l’individu dans des formes géométriques stériles qu’en filmant, en plans fixes, la fermeture de portes les unes après les autres ou un terrain de volley parfaitement carré où le sang vient maculer la blancheur d’une limite ?

Au-delà de l’exercice de style, tenu jusqu’au bout, «Cuadrilátero» est une comédie noire efficace, ouvertement politique et jouissive qui saura, nous l’espérons, trouver son public.

4/5 ★

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