Frankie France 2019 – 98min.
Critique du film
Puzzle familial
Encore méconnu du grand public Ira Sachs s’est taillé une belle réputation outre-Atlantique grâce à des œuvres douces, où l’amour se retrouve au centre. Frankie, sa première incartade européenne, était cette année sélectionnée à Cannes en compétition.
L’humilité est toujours là, dans un coin. Avec Frankie, il est toujours question de cette dimension familiale chère à Ira Sachs, des liens parfois rompus et surtout d’amour. Alors quand cette actrice, Françoise Crémont, dit Frankie (Isabelle Huppert), se sachant gravement malade, décide de convoquer les membres de sa famille et ses amis à Sintra au Portugal, l’histoire révèle les contours d’une famille recomposée et tiraillée.
Depuis 2012, Ira Sachs se construit une filmographie riche d’œuvres marquantes, poignantes: Keep the Lights On (2012), Love is Strange (2014) et Brooklyn Village (2016). Sans fard, à la gloire de l’être humain dans son plus simple appareil, courbé par les sentiments et la complexité de la vie. Il y a du Noah Baumbach chez Ira Sachs, dans les dialogues et la mise en scène. Isabelle Huppert qui se pavane au bord d’une piscine. Un frère (Jérémie Renier) et une sœur (Vinette Robinson) - par alliance - qui se chamaillent à propos de broutilles. Une valse de personnages aux rupteurs tristes, parfois enjoués, mais surtout désabusés. Ira Sachs bâtit son histoire autour de Frankie, cette femme aimée et célèbre, proche de passer l’arme à gauche. Un catalyseur relationnel parfois grincheux et même détestable. Là où Frankie (le film) touche, c’est au milieu des relations multiples, des liens que désire nouer l’actrice française avec son entourage fragmenté. Recoller les morceaux avant de s’en aller: une envie qui lui tient à cœur avant de courber l’échine.
À vouloir colmater les brèches, Ira Sachs se perd dans ces nombreuses saynètes, perdant de son mordant et de sa précision. À maintes reprises, les séquences n’apportent pas grand-chose au récit, le freinant, le rendant désespérément linéaire. Heureusement qu’Ira Sachs gère avec finesse le portrait fissuré d’une famille recomposée. Nous y retrouvons un Brendan Gleeson, en mari à l’orée d’un deuil, ou encore une Marisa Tomei en amie conviée pour entamer une hypothétique relation amoureuse avec le fils de Frankie, Paul (Jérémie Renier). Une mosaïque d’individus qui forment le noyau dur de l’existence de Françoise Crémont.En bref !
Des portraits qui en font une histoire avec ses moments tendres et doux. Toujours est-il que la densité n’est travaillée qu’à moitié. Des sous-intrigues se mêlant à une intrigue centrale mollement traitée. Le segment final, grondant de tristesse et de mélancolie, s’évoque telle une fresque dépouillée, où Frankie trône en maîtresse sur sa cour. D’un simple plan, toute la méticulosité de l’écriture et de la mise en scène de Sachs. Malgré ça, les faiblesses sont trop nombreuses pour prétendre à mieux.
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