Dans Les jeunes amants, la réalisatrice française Carine Tardieu évoque un sujet peu traité au cinéma : une histoire d’amour entre un homme et une femme bien plus âgée. Pour donner vie à cette romance d’un autre genre, Fanny Ardant et Melvil Poupaud se glissent dans la peau des amants interdits avec nuance et subtilité.

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Quand Pierre, un quadragénaire marié avec enfants (Melvil Poupaud), et Shauna, architecte retraitée de 71 ans (Fanny Ardant) se rencontrent, celle-ci est sur le point de perdre sa meilleure amie hospitalisée. Médecin de la mourante et ami de Georges (Sharif Andoura), le fils de cette dernière, Pierre tombe immédiatement sous le charme de Shauna.

Ce n’est que 15 ans plus tard que le chemin de Pierre et Shauna se recroise. Alors que Pierre accepte d’accompagner Georges en Irlande, dans la maison de vacances de ce dernier, il y retrouve Shauna, qui vient régulièrement se reposer dans ce coin reculé. Pierre la reconnaît tout de suite. Shauna, elle, a du mal à se souvenir de cet homme rencontré quelques années plus tôt, une nuit, dans les couloirs austères d’un hôpital. Mais tout de suite, la complicité renaît, l’ambiguïté avec. À partir de ce moment, les sentiments de l’un et de l’autre ne feront que grandir et les mèneront à entretenir une liaison.

C’est une histoire de tromperie très banale à première vue, mais c’est surtout une histoire d’amour peu commune. Et la citation « l’amour n’a pas d’âge » prend dès lors tout son sens. Carine Tardieu touche à un sujet peu traité sur grand écran, car encore tabou dans notre société. Le 4ème long-métrage de la réalisatrice met en lumière des amants atypiques : un homme aimant une femme plus âgée. Bien plus âgée car il n’est pas question d’une petite dizaine d’années, mais d’un écart d’âge de 30 ans. Si personne n’est choqué de voir un homme en couple avec une femme bien plus jeune, l’inverse reste encore aujourd’hui une vérité difficile à concevoir dans une société où les femmes, plus que quiconque, sont soumises aux dictats du jeunisme. Encore plus difficile à concevoir peut-être, la sexualité des aînés. La vie sous toutes ses formes ne s’arrête pas à l’âge de la retraite.

30 ans, c’est le nombre d’années qui séparent Pierre et Shauna. Ce dernier ne la voit pourtant ni comme une personne âgée, ni comme une mère, ou même une grand-mère, mais comme une femme envers qui il nourrit des sentiments profonds et un désir brûlant. Les coscénaristes Carine Tardieu et Agnès De Sacy illustrent délicatement les obstacles inhérents à une telle relation. Au-delà du jugement des gens et des regards désapprobateurs, le couple se heurte à la pénible réalité du vieillissement. Les jeunes amants évoque l’antagonisme entre un amour naissant et le temps qui file inexorablement, un compte à rebours impitoyable traduisant l’ironie de l’existence. La réalisatrice française filme subtilement les corps vieillissants, l’enveloppe corporelle qui a vécu et l’esprit qui fait parfois défaut à l’aube d’une nouvelle idylle.

La thématique du film est aussi lumineuse que brutale, aussi joyeuse que triste. Fanny Ardant et Melvil Poupaud donne corps à ce couple piégé par ses sentiments. L’actrice de 72 ans est magnifique et forme, avec son partenaire, un duo extrêmement touchant. Les deux personnages se regardent, s’écoutent, se jaugent et se tournent autour avec retenue et pudeur. Émouvant.