The Batman Etats-Unis 2021 – 176min.

Critique du film

Une œuvre singulière et réussie

Critique du film: Eleo Billet

Déjà habitué des blockbusters, Matt Reeves devient avec brio le cinquième réalisateur à porter à l’écran sa vision du Chevalier Noir. Devant composer avec l’héritage de grands noms du cinéma américain et une mythologie maintes fois explorée, il a su s’entourer d’un casting prestigieux et de techniciens hors pair pour livrer une œuvre fascinante.

Nouveau représentant de la volonté de renouveau dans l’univers des blockbusters super-héroïques chez DC, si The Batman est une singularité et une réussite, c'est avant tout par sa forme. Que ce soient ses décors tentaculaires ou la palette grise et jaune pâle des intérieurs et le flamboiement des rouges et des bleus, l’atmosphère enveloppée par la musique de Michael Giacchino est enivrante. Concernant l’intrigue qui s’y déroule, elle joue avec les éléments bien connus du mythe, tout en empruntant à David Fincher et aux films néo-noirs, notamment Seven, sa pluie et ses héros prêts à vriller.

Seulement, c’est dans son enquête simpliste qui tire en longueur et l’écriture de ses protagonistes que se logent peut-être les principales failles du film. Pourtant, Matt Reeves évite les archétypes du genre et parvient à offrir à chacun de ses personnages un arc narratif très émotionnel, qui privilégie l’exploration des fissures intérieures aux plans d’actions icônisants. D’autant que la plongée dans cette ville poisseuse, aux accents tant londoniens que new-yorkais, dépend surtout de la performance des têtes d’affiche, en particulier celle de Robert Pattinson. Ce dernier réussit à embrasser le cliché du brun ténébreux par son interprétation d’un Batman torturé, en proie à la remise en question de la peur qu’il inspire, alors qu’il ne peut plus détacher son identité de son costume : Bruce Wayne est devenu un masque.

Certes, son duo avec Zoë Kravitz manque d’alchimie, mais ces deux figures orphelines ne se sont jamais mieux unies que dans leurs griefs envers leurs pères et les maires. D’abord allégorie de l’Ombre, de Gotham même, le mammifère ailé s’éloigne finalement de la violence, pour devenir le porteur du flambeau, passant du combattant solitaire encore naïf à l’instigateur d’un véritable changement. Si cette transition rend le troisième acte plus convenu et sa symbolique parfois grossière, elle est nécessaire pour assembler les trop nombreuses pièces du puzzle, éparpillées après des heures d’allers-retours.

Du haut de ses presque 3 heures, entre la noirceur de ses partis pris visuels, l’actualité de ses thèmes, la critique de la politique étasunienne, des médias et de la radicalisation sur les réseaux sociaux, bien que l’État policier et les hôpitaux psychiatriques s’en sortent encore indemnes, le visionnage de The Batman ne laisse pas indemne. De plus, le film est l’un des rares du genre à proposer de nombreuses femmes qui ne soient pas cantonnées à des rôles de victimes, de séductrices, ou de simples faire-valoir. Entre une Catwoman ambiguë dont la caractérisation surpasse celle de Batman et la future mairesse Bella Reál (Jayme Lawson), rare figure inspirante, une chose est certaine, peu importe son succès public, il y aura un avant et un après The Batman.

02.03.2022

4

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Commentaires

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Baboule

il y a 1 an

Un chef d'oeuvre; envoûtant; on sort subjugué. Robert Pattinson mais aussi tous les autres acteurs principaux sont excellents; Un Bruce Wayne tellement humain! Violent et si doux en même temps avec sa voix magnifique. Convaincue. Je le reverrais sans cesse!


Sequoia

il y a 2 ans

Film très bien fait bien qu’un peu violent et trop sombre. La bande son est excellente et le montage très efficace. Il dure presque 3 heures tout de même mais on ne sent pas le temps passer. J’ai trouvé agaçant à la longue la diction lente et la voix caverneuse et trop basse de Batman (Pattison) dont la biographie est un peu revisitée et pour lequel on ne ressent aucune sympathie, tellement le personnage est sombre, hautain et sans la moindre touche d’humour.Voir plus


CineFiliK

il y a 2 ans

“Twilight”

En cette soirée d’Halloween, le maire de Gotham est sauvagement assassiné. Sur son cadavre mis en scène, une enveloppe adressée à Batman. Le jeu du chat et de la chauve-souris a commencé.

Noir, c’est noir, il n’y a plus d’espoir. Malgré la présence depuis deux ans du justicier masqué, la délinquance urbaine et les crimes n’ont jamais été aussi nombreux. La nouvelle candidate à la municipalité aspire à un véritable changement. Mais en proie à une corruption crasse, dans ses élites et ses bas-fonds, la City est en train de couler.

Il y a du David Fincher dans l’œil de Matt Reeves. Sa relecture réussie du mythe est encore plus crépusculaire que chez Christopher Nolan. Sous une pluie battante et sans rayon de soleil aucun, les corps sadisés et les énigmes s’alignent comme dans Se7en. Le signe du Zodiac est un papillon à tête de mort, le Sphynx. Batman, aidé de sa féline complice, n’a d’autre choix que de mener l’enquête. Une approche quelque peu ludique pour nous divertir durant ces trois heures sombres. Mais cette radicalité affichée séduit. Pas de gadgets ultrasophistiqués, ni de costumes trop voyants. Un masque à gaz et du ruban adhésif pour le Riddler. Une cagoule déchirée et des ongles aiguisés pour Catwoman. En Pingouin obèse et juste balafré, Colin Farrell s’avère méconnaissable. Quant à Bruce Wayne, c’est un fantôme. Voix caverneuse, khôl surlignant ses cernes, il a la gueule d’une rock-star insomniaque et sous sédatif. Dans son costume aux bottes compensées, ce sont les pas de Dark Vador qui résonnent et inquiètent quand il approche. Ce n’est plus le héros terré dans l’ombre, c’est l’ombre. Plus humain qu’animal, comme tous ses partenaires hybrides, il est meurtri, faillible, violent et craint de s’élancer du haut d’un gratte-ciel. Monolithe gothique, Robert Patinson vampirise le rôle et convainc.

Ainsi, Gotham City et les âmes noires qui la hantent n’ont jamais été aussi proches de nous. Brûlée par les bombes ou noyée sous les eaux, la métropole n’est que le miroir brisé de ce qui explose aujourd’hui à nos portes et sous nos yeux.

(8/10)Voir plus

Dernière modification il y a 2 ans


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