Petite maman France 2021 – 72min.

Critique du film

Ma fille, tu as mon âge

Sven Papaux
Critique du film: Sven Papaux

Après son splendide Portrait de la jeune fille en feu, Céline Sciamma s’attaque à l’enfance dans «Petite maman». Un film présenté à la dernière Berlinale, dépouillé et épousant les empreintes de l’enfance laissées par les parents.

La jeune Nelly (Joséphine Sanz) abandonne la maison de retraite où sa grand-mère s’est éteinte. Un adieu aux différents résidents, pour atterrir dans la maison de sa défunte grand-mère. Avec ses parents, Nelly restera plusieurs jours pour vider la maison d’enfance de sa mère. Un jour, sa maman s’absente et l’enfant va rencontrer une nouvelle amie: Marion (Gabrielle Sanz). Une fille du même âge qui lui paraît (très) familière.

Un lien si fort que même le surnaturel s’en mêle? Dans cette histoire qui se veut tendre et empreinte de justesse, Sciamma sonde l’âme enfantine par le prisme du fantastique - ou plutôt à la lisière - pour gribouiller une relation magique entre Nelly, 8 ans, et Marion, sa mère, à ses 8 ans. En brassant consolation, tristesse, enfance et curiosité, le film fonctionne grâce à un dispositif clair: une photographie ultra sobre et une écriture presque figée, comme le temps d’une rencontre magique avec sa mère. Un instant suspendu, une bulle temporelle s’envolant et englobant cette rencontre symbolique.

Avec cette nouvelle œuvre dépouillée un cran en dessous de sa précédente, Sciamma ne convoque pas les affres sentimentales aperçues dans Portrait de la jeune fille en feu. Un métrage moins emballant et nettement moins bouleversant. Cette fois-ci, à travers ce cadeau du temps, le problème réside dans le casting: Nelly pêche par le fameux défaut d’une enfant actrice: sa propension à réciter son texte sans le vivre pleinement. Les échanges entre Joséphine Sanz et Gabrielle Sanz n’embrassent pas la force du scénario. Les dialogues sont un long récital sans âme, brisant le facteur émotionnel du film. Petite maman est une connexion spéciale, un lien profond à propos de l’enfance et de la tristesse, où la curiosité d'une petite fille se confronte à la découverte des peurs de ses géniteurs. Alors que de l’autre côté une mère tente de fuir un chagrin.

Le métrage, à la durée de 72 minutes et fait de contemplations parfois ennuyeuses, démontre une réelle puissance narrative, mais l’obstacle qu’est le jeu de Gabrielle et Joséphine Sanz n’offre pas le vertige souhaité. Sans quoi, Petite maman sentait bon la grâce. L’histoire possède néanmoins cette veine originale et révèle une observation intelligente de l’enfance. Sciamma, sans exceller, s’enfonce dans la forêt des songes pour convoquer une vérité irréaliste satisfaisante.

29.07.2021

3

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Commentaires

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CineFiliK

il y a 2 ans

“Fille-mère”

Nelly, 8 ans, vient de perdre sa chère grand-mère et retourne avec ses parents dans sa maison pour la vider. Dans la forêt environnante, elle rencontre une autre fille de son âge. Elle comprend qu’il s’agit de sa maman Marion, enfant.

Comment passer des au revoir aux adieux ? Comment garder pied quand le lien et ses racines sont définitivement coupés ? Céline Sciamma aborde le deuil et la transition avec délicatesse. Sans vraiment y toucher, elle choisit le fantastique. Entre les murs de ses premières années, Marion adulte préfère la fuite à la confrontation. Son double rajeuni se substitue à elle, ce qui permettra à Nelly de faire face à la disparition, de l’accepter et la comprendre. Pas de fantômes effrayants, ni de retour vers le futur au moyen d’une machine, tout se passe naturellement. Et c’est sur ce point que le film déçoit. Comment croire au merveilleux quand l’émerveillement n’atteint pas les personnages ? Adultes et enfants ne s’étonnent de rien : ni de la gémellité des petites héroïnes – les sœurs Sanz, parfois mécaniques dans leurs intonations – ni du caractère identique des maisons visitées. Pourtant trouble il y a quand mère et fille se confondent et se posent des questions difficiles : T’ai-je désirée ? Crains-tu que je sois partie à cause de toi ? Vais-je revenir ?

Céline Sciamma explique qu’elle a pensé au cinéma de Hayao Miyazaki qu’elle frôle lorsque le vent se lève et que l’orage menace au loin. Mais la crainte, l’hébétude et l’enthousiasme imprègnent les figures du Japonais quand Totoro émerge ! Tout paraît figé ici, sauf lorsqu’une pyramide lacustre décroche enfin les mâchoires des deux fillettes.

On retiendra toutefois ces très beaux moments : Nelly nourrissant sa mère adulte lorsqu’elle conduit ou aidant à raser la barbe de son père qui redevient d’un coup le jeune homme qu’il était. Et ce dialogue si simple, si perçant entre une enfant et sa maman : « Je suis contente de t’avoir rencontrée ».

(6.5/10)Voir plus

Dernière modification il y a 2 ans


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