There Is No Evil République Tchèque, Allemagne, Iran 2020 – 150min.

Critique du film

Quand une porte se ferme, une fenêtre s’ouvre

Sven Papaux
Critique du film: Sven Papaux

Mohammed Rasoulof, cinéaste très engagé politiquement, avait raflé la mise à la dernière Berlinale avec son film There is No Evil. Vainqueur de l’Ours d’or à Berlin, il avait surtout brillé par son absence, coincé dans son pays et interdit de quitter le territoire.

4 histoires: Heshmat (Ehsan Mirhosseini), un père et un mari exemplaire qui se lève tôt tous les matins pour aller on ne sait où. Il y a Pouya (Kaveh Ahangar) qui entame son service militaire et un soir, confronté face à un dilemme, il doit prendre une décision dramatique. Javad (Mohamad Valizadegan), lui, ne pensait pas que demander la main de sa fiancée serait entachée par la mort d’un ami cher. Pour finir, il y a Bahram (Mohammad Seddighmehr), le 4e larron de cette quadruple histoire, un médecin incapable de pratiquer la médecine. Il décide donc de s’ouvrir à Darya, sa nièce.

Mohammad Rasoulof, dans de sales draps depuis son film Un homme intègre, nous pond un métrage sur le dilemme moral. Le métrage débute comme bon nombre de productions de cinéma d’auteur iranien: dans une voiture. Jafar Panahi nous avait promenés dans sa carriole Taxi Téhéran pour nous peindre une fresque sociale iranienne. Rasoulof préfère lui basculer entre ses protagonistes. Au nombre de 4, nos instigateurs vont s’avancer dans cette fameuse question: le bien et le mal ne sont pas toujours ce que l’on croit. Malheureusement, la percée dans There is No Evil arrive rapidement à nous ennuyer dans ses situations qui s’étirent et ses dialogues simplistes. Il n’y a jamais le vertige que devrait engendrer une telle question existentielle. À la place, There is No Evil n’offre jamais la subtilité escomptée, surtout quand la valeur cardinale est de sonder la culpabilité de l’âme humaine.

Alors oui, le film tient debout, nous traîne vers de bonnes séquences, surtout quand l’objectif bascule du côté du questionnement des bourreaux - la thématique de la mort est omniprésente -, mais il pêche souvent par son rythme souvent absent, rendant le film totalement inégal. Mais derrière ces innombrables faiblesses, Rasoulof tente d’injecter une tendresse dans cette valse élégiaque. Le résultat, bien qu’empesé, décoche une question foncièrement intéressante, mais trop souvent enlisée dans des tartines de dialogues: qui décide vraiment de la loi. Derrière cette réflexion très intéressante, Rasoulof «sauve» son œuvre tournée à l’abri des regards des autorités, comme le cinéaste est interdit de pratiquer. Peut-être qu’elle est là la force: tourner et exercer alors qu’on ne le peut, à l’instar de la justice universelle.

29.04.2021

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Commentaires

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CineFiliK

il y a 2 ans

“Des hommes intègres”

Ils sont maris attentifs, pères affectueux, fils attentionnés, amoureux. Et ils tuent.

Il est si facile d’ôter la vie d’un être vivant. Il suffit d’appuyer sur un bouton, une gâchette, ou pousser un tabouret. Comment affronter le miroir ensuite, se racheter une conscience ou, pire, s’y habituer ? L’homme n’a pas besoin du Diable pour agir. Il lui suffit d’obéir.

La différence est-elle si claire entre un lourd sac de riz transporté avec peine et un cadavre encombrant ? Le garde et le prisonnier ? Un chasseur et sa proie ? L’innocent et le coupable ? La réponse est non. Un mot pouvant exiger courage et résistance.

A travers quatre histoires qui se font écho, l’Iranien, interdit de quitter le territoire, questionne son pays, ses concitoyens et son spectateur. Et moins l’on en sait sur l’Ours d’or 2020, plus on aura la chance de se laisser intriguer, surprendre et choquer par ses images. Scènes de la vie conjugale, fuite en avant suffocante, romance avortée ou secret de famille, la réalisation fluide mélange les genres. Les parkings souterrains, couloirs sombres ou routes ensablées que le cinéaste filme en caméra subjective ont tout d’un cheminement moral, ce labyrinthe dans lequel on s’arrête et s’égare parfois. Jusqu’à ce paradoxe exprimé : « Je tuerai celui qui m’oblige à tuer ».

(8/10)Voir plus

Dernière modification il y a 2 ans


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