Les Feuilles mortes Finlande, Allemagne 2023 – 82min.

Critique du film

A la recherche du bonheur perdu

Critique du film: Teresa Vena

Avec «Les Feuilles mortes», présenté en Compétition à Cannes, Aki Kaurismäki est revenu à ses premières amours. L’occasion pour le cinéaste de dévoiler une fable amoureuse aussi touchante que caractéristique de son style.

À Helsinki, Ansa (Alma Pöysti) se fait licencier du supermarché dans lequel elle travaille pour avoir emballé un plat préparé qu'elle aurait dû, selon les règles, jeter en raison de la date de péremption. Holappa (Jussi Vatanen) est congédié après avoir causé un accident dans l’atelier de métallurgie dans lequel il est employé. Deux personnages solitaires qui bientôt se rencontrent au hasard d’un karaoké et qui doucement, discrètement, entrent chacun dans la vie de l'autre.

Sorti des radars en 2011 avec «Le Havre», déjà présenté en compétition cannoise, le réalisateur finlandais Aki Kaurismäki s’était depuis fait bien silencieux. Un mutisme que brise aujourd'hui «Les Feuilles mortes» («Kuolleet lehdet» en VO), un touchant long-métrage sur le récit de deux âmes amoureuses et vagabondes, porté par le style si singulier de son cinéaste. «Les Feuilles mortes» se distingue en effet par son langage visuel, sa caméra fixe, sa palette de couleurs ternes, et le minimalisme de son histoire. Ainsi, le scénario ne comporte que quelques dialogues écrits et les mimiques théâtrales des formidables Alma Pöysti et Jussi Vatanen portent l’entièreté du film. Alors peut-être que leurs gestes paraitront figés, et s’ils regardent longuement la caméra, et prennent le temps de la réflexion, ce n’est que pour mieux nous cueillir une fois les mots incarnés.

Au diapason de ses œuvres précédentes, le cinéaste paraphe son film d'un humour pince-sans-rire séduisant et d'une atmosphère légèrement morose et mélancolique qui caressera l'âme des esprits romantiques. Aki Kaurismäki utilise aussi le spleen inhérent à ses films pour faire de son cinéma un lieu de nostalgie et d’hommage. Une volonté que traduisent les multiples références du réalisateur aux grands maîtres tels que Godard, Bresson et Chaplin. Aussi riche et admirable fut la Compétition cannoise cette année, «Les Feuilles mortes» nous a ému, tout simplement.

(Cannes 2023)

(Traduit de l’allemand)

27.06.2023

4.5

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Commentaires

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CineFiliK

il y a 6 mois

“La chance aux chansons”

C’est dans un karaoké, sur un lied de Schubert, que Holappa croise le regard d’Ansa. Premier drôle d’endroit pour une brève rencontre entre deux solitaires.

Elle est caissière dans un supermarché, payant difficilement ses factures d’électricité qui augmentent. Face à un chef autoritaire qui lui assène que le sandwich périmé qu’elle a caché dans son sac appartient à la poubelle, elle lui rétorque un « Moi aussi » cinglant. Il est manœuvre sur des chantiers, dissimulant ses bouteilles dans un boîtier de dérivation. Deux âmes errantes qui, entre chômage, labeur, déprime et addiction, tentent de s’accrocher l’une à l’autre.

Dans ce cinéma d’un autre âge où les zombies de Jarmusch sont comparés à du Godard ou du Bresson et s’accompagnent d’un chien nommé Chaplin, s’agite la patte atypique d’Aki Kaurismäki. Soit un univers terne dans lequel tente de s’imposer quelques couleurs. Voix monocorde et pudeur affichée poussent les personnages à agir comme des enfants. Échanges chastes, gestes distanciés et poignée de main pour conclure un accord, avant qu’un baiser sur le front ne réveille le comateux. La vérité se trouverait-elle dans les contes, quand les sentiments de ces modestes taiseux s’expriment dans les chansons diffusées ? Derrière le tendre se terre le drame. L’alcool plombe les consciences et la radio crache les nouvelles du front ukrainien, si loin, si proche de la frontière finlandaise. Sous la poussière, la poésie du réalisateur veut voir aujourd’hui encore l’autre côté de l’espoir, même si les feuilles mortes se ramassent à la pelle.

(6.5/10)Voir plus

Dernière modification il y a 6 mois


TOSCANE

il y a 6 mois

Il fait toujours froid dans les films de Kaurismäki, même en été … malgré ses couleurs rouge, rouge sombre, rouge orange, c’est un pan de vie des écorchés, des alcooliques, c’est Kaurismäki, L’homme sans passé. Quand la très belle femme un peu bergmanienne, un peu Liv Ullmann, achète une assiette et un couvert afin de pouvoir inviter son ami, espoir d'un futur amour, pour un dîner, je me dis que là on touche un peu le fond de la solitude. De la grande solitude.Voir plus


Eric2017

il y a 6 mois

Ce n'est pas un film qui respire la gaieté. C'est en permanence sombre et ça démontre entre autre les difficultés d'une rencontre dans un pays ou l'alcoolisme se trouve à tous les coins de rue. Tout y est calme. Les images la voie des acteurs, le rythme donné par la mise en scène. Quelques belles images montrant des anciennes affiches de film français et anglais. J'ai trouvé le film bien sans plus. (G24.09.23)Voir plus


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