Le sixième enfant France 2022 – 92min.

Critique du film

L'arrangement impossible

Critique du film: Kilian Junker

Premier film de Léopold Legrand, il nous offre avec la complicité de son quatuor d’acteurs un drame sur le désir de maternité et les questions éthiques qui l’entourent. Le film est présenté en grande première au Festival du film français d’Helvétie (FFFH) à Bienne.

Issus de la communauté des gens du voyage, Frank et Meriem forment un couple dont le sixième enfant est en route. Une mauvaise nouvelle puisque endettés jusqu’au cou, ils ne peuvent guère l’assumer. À la suite d’un petit délit, Frank croisera la route de Julien, l’avocat qui le défendra. Ce dernier, au sein du couple qu’il forme avec sa femme Anna, est confronté au souci inverse : ils n’arrivent guère à concevoir. De cette rencontre nait alors l’idée d’un impensable arrangement.

En réalisant ce film tiré du roman d’Alain Jaspard «Pleurer des rivières», Léopold Legrand faisait face à deux écueils principaux : d’abord le risque élevé de caricature vis-à-vis de ce portrait brossé de deux couples socialement diamétralement opposés, mais aussi la construction d’un film tire-larmes au vu de son thème éminemment émotionnel. Et le réalisateur réussira, avec plus ou moins d’aisance, à naviguer entre les deux. Cela s’explique par un casting particulièrement convaincant (Sara Giraudeau en tête), mais aussi par une imprégnation dans le milieu des gens du voyage, réalisée en amont du tournage, qui évite une avalanche de clichés.

Si Legrand favorise une réalisation plutôt sage, il se permet toutefois quelques saillies picturales : des plans de nuit magnifiés, certaines scènes construites comme des tableaux ainsi qu’un format inconventionnel, presque carré, qui cloître ses personnages. Un cadre d’ailleurs raccord avec l’enfermement que subissent les deux couples dans leur misère ou leur détresse émotionnelle. Mais la réalisation caméra à l’épaule vient à lasser, tout comme les retournements de situation bien prévisibles. De plus, une dilatation temporelle amenée vers la fin du récit crée quelques moments de flottement qui rendent le tout un brin longuet. En subsiste un film maladroit, mais sincère, qui a le mérite de nous interroger face à ces questions sociétales épineuses.

(Festival du film français d’Helvétie 2022)

13.10.2022

3

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CineFiliK

il y a 1 an

“Nerveuse grossesse” 

Franck, gitan, vit dans une caravane avec Meriem et leurs cinq enfants. Recel et accident l’entraînent au tribunal. Julien, son défenseur, lui obtient le sursis. Avec son épouse Anna au volant, il ramène le blessé libre chez lui, au camp. Les Parisiens y rencontrent sa famille, sur le point de s’agrandir encore.

Les séquences initiales font craindre le clivage social surligné. L’Audi noire qui s’introduit sur le terrain vague, alors qu’on dort à sept dans une roulotte exiguë. La différence entre classes est marquée mais gommée par la bienveillance ambiante et les peines exprimées. L’énergie, l’argent et les moyens manquent d’un côté. L’absence de progéniture en devient maladive de l’autre. Un bébé peut-il être la solution ? Sur le papier, la question est à rejeter d’un revers de main. Mais dans l’intimité, les esprits endoloris s’échauffent. Foi, code et psychologie imposent leurs lois. Mais quid de la morale quand on est couple d’avocats ?

Adapté d’un livre – Pleurer des rivières –, ce premier film touche au romanesque et tire sur la corde sensible de son scénario. Mais le quadrille magnifique qui l’interprète permet d’outrepasser ses a priori et d’écouter, voire de comprendre, le point de vue de chacune et chacun. Quand les hommes raisonnent avec pragmatisme, les femmes laissent parler leur cœur en évitant la caricature. Plutôt que de sombrer dans le lacrymal, la grossesse devient nerveuse quand l’art du mensonge s’immisce. L’angoisse d’être découvert tient en haleine et l’émotion pointe quand on ne s’y attend plus. Mais quoi qu’il arrive, ce n’est que quand on fait du mal que l’on va en enfer.

(7/10)Voir plus

Dernière modification il y a 1 an


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