So Long, My Son Chine 2019 – 180min.

Critique du film

Une fresque virtuose

Théo Metais
Critique du film: Théo Metais

Un couple de la classe ouvrière chinoise vit paisiblement tandis que le gouvernement de la République populaire de Chine vient de mettre en œuvre la politique de l'enfant unique. Un équilibre familial rompu lorsqu’un tragique accident frappe le couple et son entourage. Alors qu’ils tentent de survivre à la perte d’un enfant, So Long, My Son suivra ces parents sur près de trois décennies pour nous conter une histoire de la Chine.

Ours d’argent cette année à Berlin, Synonymes de Nadav Lapid lui sucrait l’Or et l’on ne s’en est toujours pas remis… Une puissance poétique miraculeuse, une fresque bouleversante de la Chine. Pendant trois heures, l’iconique Xiaoshuai Wang nous embarque dans la vie de deux frères et leurs couples. Une vie bouleversée quand leurs enfants, innocemment, un jour chahutent dans l’eau d’un lac et que l’un d'eux se noie. Le mystère autour de l’accident propulse le récit et fera de So Long, My Son un film événement. «Le vent se lève !... Il faut tenter de vivre!», écrivait Paul Valery. Quand le tissu familial est pourri à la moelle, il faut tenter de vivre. Frère un jour, frère toujours?

Réponse administrative à la surpopulation de la Chine, la politique de l’enfant unique (en vigueur jusqu’en 2015) ne cessera de hanter le long-métrage. Une élégance rare, une distance, une pudeur et ce dès l'entame. Il faudra voir la caméra se poser tendrement sur le haut de colline et observer le drame à distance, comme un wanderer qui passerait là. Jusqu’aux retrouvailles téléphoniques en tomber de rideau à vous scier le cœur, à 53 ans Xiaoshuai Wang propose une nouvelle fois un cinéma virtuose, une fresque de la classe ouvrière en prise avec le deuil, la culpabilité et la modernité.

Portraitiste infatigable, réalisateur visionnaire à l’épreuve de la censure; d’abord placé sur une liste noire dans les années 90, le réalisateur (prix du Jury à Cannes en 2005 avec Shanghai Dreams) a dû une nouvelle fois se plier à la longue et périlleuse procédure de validation. Présenté cette année à Berlin, So Long, My Son révélait trois heures d’une beauté asphyxiante, l’impression d’avoir vécu une vie. Une tranche d’histoire chinoise, celle d’une classe ouvrière éreintée, celle de ces parents, magistralement incarnés par Mei Yong et Jingchun Wang (respectivement sacré meilleur acteur et meilleure actrice), dont personne n’est revenu indemne.

En bref!

Ours d'argent à Berlin, l’immense Xiaoshuai Wang dévoilait une fresque à l’envergure d’un chef-d’œuvre au cœur de la Chine. Une classe ouvrière essoufflée, une parenté effondrée et les mutations accélérées du pays, So Long, My Son est du (très) grand cinéma.

27.08.2019

5

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Commentaires

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CineFiliK

il y a 4 ans

“Enfants uniques”

« Je ne sais pas nager ! » se lamente Xingxing auprès de Haohao, impatient. Les amis de toujours désirent pourtant rejoindre un groupe de garçons qui s’amuse près du barrage. Le risque, trop grand, s’impose et laisse, dans la Chine de 1979, deux parents effondrés.

Il fallait bien 3 heures pour raconter près de 30 années de l’histoire d’un couple, rattachée à celle de tout un pays. La politique imposée de l’enfant unique a sacrifié toute une génération au nom d’une économie collective : accident, avortement, adoption, licenciement et mensonge, la pression est trop forte sur les épaules de Yaojun et de Liyun, unis pour le meilleur et pour le pire. S’accrochant l’un à l’autre, suite à des turbulences aériennes, l’épouse s’étonne encore de craindre la mort. Leur visage vieillissant et l’amour qu’ils partagent, malgré le deuil et le temps passé, touchent au cœur.

On s’égare parfois dans les méandres non chronologiques de ce film fleuve, peinant à dessiner tous les liens qui rattachent les nombreux personnages. Mais le système inique dénoncé et la mélancolie ambiante qui s’en dégage émeuvent profondément.

7.5/10Voir plus

Dernière modification il y a 4 ans


Rosalie

il y a 4 ans

Plongée dans l'histoire de la Chine de Mao jusqu'à nos jours au travers dun' drame familial. J'ai eu quelque peine à comprendre la construction de l'histoire au début avec les flash black à répétition, mais le puzzle se construit petit à petit. On s'immerge alors dans la réalité terrible de cette époque avec ses contraintes et contrôles sociaux. Le rythme est lent, le jeu des acteurs sensible et juste et après trois heures, on a l'impression de sortir d'un voyage dépaysant.Voir plus


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