Impulso France 2017 – 85min.

Critique du film

Flamenco niveau expert

Lino Cassinat
Critique du film: Lino Cassinat

Le flamenco est un art à part dans le monde de la musique, autant dans son histoire que dans ses codes musicaux. On en retient surtout les impressionnantes performances guitaristiques à la Paco de Lucia, mais c’est en réalité une pratique très codifiée, au coeur de laquelle se trouvent le chant et la danse. Et comme Paco de Lucia avant elle, la plus grande danseuse de flamenco actuelle Rocio Molina est bien décidée à emmener son art vers de nouvelles terres.

Mais si le légendaire guitariste a amené le flamenco vers sa continuation logique, à savoir une hybridation avec le jazz et la musique fusion en général, Rocio Molina tente un nouveau geste d’une passionnante radicalité... qui sera malheureusement totalement imperceptible pour quiconque ne connaît pas un minimum le style et ses conventions sur le strict plan musical (et même vestimentaire).

Non pas que le spectateur doive s’attendre à une avalanche de termes musicaux complexes, mais plutôt à ne pas comprendre exactement la lutte de Rocio Molina avec elle-même, ni le caractère novateur de ses tâtonnements. Pour autant, si les voies de l’accentuation rythmique à 12 temps vous sont impénétrables, ou si vous ne saviez pas par exemple qu’une danseuse est censée s’attacher les cheveux en chignon, Impulso ne manquera pas pour autant de vous charmer par d’autres aspects.

D’abord, parce que le film est régulièrement impressionnant. Pas besoin d’être un grand connaisseur de flamenco pour avoir la mâchoire qui se décroche dès les premiers pas de Rocio Molina, rapides comme une mitraillette. Ensuite, parce que Emilio Belmonte filme le corps au travail de la danseuse avec un grand sens du cadre, alternant élégamment entre pesanteur et grâce, entre gros plans sur les muscles et les visages à l’effort d’un côté et plans larges composés permettant à l’énergie de la danseuse de se déployer dans l’espace. Enfin, parce que Rocio Molina travaille également la dimension plastique de sa danse, et que son imagination nous emmène vers des terres bien surprenantes, organisant par exemple une rencontre inopinée mais d’une intelligence infinie entre Goya et le clip de Second Son of R d’Oathbreaker lors d’une magnifique scène mêlant danse et peinture, transformant Rocio Molina en flamboyant pinceau vivant.

En bref ! Rocio Molina est un captivant pinceau vivant, mais sa toile risque de laisser bien du monde sur le bord de la route. Le voyage demeurera cependant très plaisant pour quiconque acceptera de se laisser porter sans tout comprendre.

25.03.2024

3.5

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