CH.FILM

Chris The Swiss Suisse 2018 – 90min.

Critique du film

Tragique destin d’un journaliste suisse

Clélia Godel
Critique du film: Clélia Godel

Journaliste suisse de vingt-six ans, Chris a été assassiné dans de mystérieuses conditions, en Janvier 1992, pendant le conflit yougoslave en Croatie. Anja Kofmel, sa cousine, n’était qu’une enfant au moment des faits. Devenue réalisatrice, elle cherche aujourd’hui à comprendre les raisons qui poussèrent son cousin à s’impliquer dans cette guerre, au point que l’on retrouve son corps vêtu de l’uniforme d’une milice d'extrême droite. Mêlant animations et prises de vue réelles, la première réalisation de Anja Kofmel est une enquête captivante au coeur des Balkans.

En Octobre 1991, Christian Würtenberg, 27 ans, débarque en Croatie comme reporter de guerre, mais trois mois plus tard le jeune journaliste est retrouvé mort. Comment ? Pourquoi? L’histoire ne cesse de hanter sa cousine, Anja Kofmel, réalisatrice de Lugano, qui lui consacrait déjà en 2008 le court-métrage Chrigi. Le documentaire s’ouvre d’ailleurs sur la représentation animée d’un cauchemar, le mauvais rêve d’Anja, choquée par l’annonce de la mort de son cousin. Après un court rappel de la complexité du contexte de la guerre en Yougoslavie, la réalisatrice nous emmène dans les contrées croates, sur les traces de son cousin.

À l’aide des cahiers de Chris, Anja Kofmel tente de rencontrer des personnes qui pourraient l’aider à percer le mystère de son cousin et de son étrange assassinat. Au fil des témoignages et des brèves interviews avec les membres de sa famille, on découvre que son destin semblait être scellé avant même son départ… Les principaux protagonistes n’étant plus parmi nous, quelques personnalités, ayant connu Chris, acceptent de parler face caméra. Leurs témoignages permettent à l’enquête d’avancer et au-delà de la démarche personnelle de la réalisatrice, ce sont précisément les zones d’ombre de cette investigation et les méandres du conflit qui font de Chris The Swiss une chronique de guerre passionnante.

Parmi les moments forts, la rencontre avec des anciens membres de la «First Platoon of International Volunteers» provoque un grand malaise. En effet son jeune cousin était devenu l’un des leurs quelques semaines avant sa disparition. Cette scène nous laisse à penser que l’assassinat de Chris était en lien avec un projet que le journaliste menait depuis de longues semaines. Mais la trop grande proximité (émotionnelle) d’Anja Kofmel avec son sujet empêchera peut-être au documentaire d’offrir une narration objective.

Si les moments en prises de vue réelles reprennent les caractéristiques du documentaire classique, l’animation apaise la violence des faits historiques. Réalisés en nuances de gris, les dessins donnent vie au personnage de Chris et apportent une possible interprétation des éléments manquants à l'enquête. La violence est transcrite sous forme métaphorique (un tourbillon de créatures noires qui s’en prennent aux hommes) et se teinte du souvenir de chefs-d'oeuvre du genre: Persepolis ou Valse avec Bachir. La vision délicate de la réalisatrice contraste pourtant avec l’utilisation d’images assez crues (voir impudiques); des photos de corps (dont celui de Chris), qui ne paraissent pas nécessaires au récit. Certes, elles rappellent l’horreur de la guerre, mais les métaphores animées suffisent.

En bref ! En choisissant l’animation pour évoquer l’horreur, Anja Kofmel tente d’apaiser la violence du conflit yougoslave et de retracer le destin tragique de ce jeune journaliste devant lequel on ne peut rester que stupéfait. Mais Chris The Swiss est avant tout un documentaire passionnant qui permet à sa réalisatrice de panser une vieille blessure personnelle et de rendre hommage à son cousin.

17.09.2018

4

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