Critique22. Juni 2022

«Elvis» - L’homme qui murmure à l’oreille du King

«Elvis» - L’homme qui murmure à l’oreille du King
© 2022 Warner Bros. Ent.

Baz Luhrmann s’attaque à l’histoire du King et son mentor, et rarement les indigestions cinématographiques n’ont été aussi délicieuses!

Présenté Hors Compétition à Cannes, le biopic du célèbre Baz Luhrmann consacré à Elvis Presley se révèle enfin. Une plongée machiavélique au cœur de cette relation qui le liait corps et âme à son manager de 1955 à sa mort, en 1977.

Robert Johnson lui a troqué son âme contre du talent, ici le diable aura pris l’apparence de Tom Hanks, méconnaissable sous l’embonpoint du bonimenteur qu’il incarne : le colonel Tom Parker. Ancien du monde forain, le businessman s’est aiguisé les crocs en promouvant la country du « Hank Show » sur les routes des États-Unis. Et puis, viendra ce jour où il découvre, ébahi, «That’s all right (mama)» à la radio.

Une tornade visuelle étourdissante...– Théo Metais

La vie de Parker en sera bouleversée, et bientôt l’homme et l’artiste se retrouvent dans les hauteurs silencieuses d’une grande roue, isolée de la foule. Parker pose ses conditions : « Je te donnerai tout ce que tu veux à condition que tu fasses tout ce que je te demande de faire ». Et le King de celer le contrat d’une poigne de fer. C’est d’ailleurs le colonel qui nous raconte toute cette histoire, perçant le quatrième mur dès l’entame depuis sa tour d’hôpital à Las Vegas.

Ainsi, Baz Luhrmann, réalisateur acclamé de Moulin Rouge (2001) et Romeo+Juliette (1996), et grand maître des folies furieuses à l’écran, arc-boute son film à tout ce qui fait du cinéma un art majeur. Un art de la démence et de l’opulence. Il n'en fallait pas moins pour conter une nouvelle fois la fable du gamin de Tupelo, l’histoire d’un mythe façonné à la barbe du XXeme siècle. Et son influence, aussi.

«Elvis» - L’homme qui murmure à l’oreille du King
Tom Hanks et Austin Butler dans «Elvis» © 2022 Warner Bros. Ent.

Une tornade visuelle étourdissante ou les uchronies musicales se mêlent à sa genèse dans le Mississippi, coiffé d’un éclair Captain Marvel, en passant par ses pérégrinations à Beale Street aux côtés de B.B King, les déboires de son mariage, les campagnes de diffamation et jusqu'à l’interminable résidence à Vegas. Trois icônes, Luhrmann, Hanks et Presley, se rencontrent et révèlent le petit prince Butler qui aura bien mérité l’œuvre du cinéaste pour briller, enfin.

Pantin génial de la manufacture du wonder boy australien, l’acteur prête son aura et sa voix à un incroyable Elvis de plastique. Une performance magnétique, certes, mais tellement enrobée de l’excentricité Luhrmann qu'elle en perd peut-être de son authenticité, de son intimité.

L’histoire d’un mythe façonné à la barbe du XXeme siècle...– Théo Metais

«Elvis» est cette pluie diluvienne de strass, de plans sous stéroïdes et d’idées de montage époustouflantes. Bien loin du biopic paisible au coin du feu, qui ne tiendrait que par la simple prestance de son interprète, la maestria du réalisateur nous rend la fièvre d’Elvis et l’emprise du colonel Parker. Car dans les alcôves du gigantisme se terre aussi, et surtout, l’envie de dépeindre une Amérique déchirée par le racisme, le sexisme, la tartuferie…

Il est certainement l’un des derniers monstres du cinéma à penser ses films comme les «armes de divertissement massif», dont parlait Vincent Lindon en ouverture du Festival de Cannes. L’Australien n’est pas un cinéaste du streaming et la démesure de ses films nous le rappelle chaque fois. Le mont Elvis était imprenable et pourtant. Aussi baroque soit la forme, il nous manquera d’avoir été complètement envoutés, mais dans la course du «hound dog», fallait-il seulement percevoir une allégorie du siècle à venir.

4/5 ★

Le 22 juin au cinéma

Plus d'informations sur «Elvis».

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