Interview

Joseph Gordon-Levitt : “Exister pour un autre, c’est ça être acteur!”

Patrick Heidmann
Interview: Patrick Heidmann

Une critique sociale, une vision de la démocratie et un modèle de courage; Joseph Gordon-Levitt nous parle du film «Snowden» réalisé par Oliver Stone et de sa rencontre avec Edward Snowden.

Joseph Gordon-Levitt : “Exister pour un autre, c’est ça être acteur!”

Joseph Gordon-Levitt, l’affaire Edward Snowden excite l’opinion publique depuis 2013, que connaissiez-vous de cette histoire avant de décrocher le rôle?

A vrai dire pas grand chose… Quand Oliver Stone est venu vers moi, j’étais extrêmement enthousiaste à l’idée de tourner avec un réalisateur aussi fascinant mais en réalité, je ne connaissais pas bien l’affaire. Je savais simplement qu’Edward Snowden était une sorte de révolutionnaire avant-gardiste 2.0 que l’on pouvait rapprocher de Julien Assange par exemple.

Pour les préparatifs du film, il me semble que vous avez rencontré Edward Snowden, non ?

Effectivement, je suis allé chez lui à Moscou ; ça a été une superbe expérience. J’étais particulièrement curieux de le rencontrer pour découvrir qui il est réellement, en dehors des interviews je veux dire. Les gens sont tellement plus intéressants dans leur réalité qu’à la télévision.

Comment vous avez vécu cette rencontre ?

J’ai été agréablement surpris de voir à quel point il est accueillant. Il vient de Caroline du Nord et vous savez ce que l’on dit sur les gens de là-bas ? Qu’ils sont les princes des bonnes manières et de la courtoisie. C’est passionnant de le voir défendre ses convictions avec autant de ferveur et rien chez lui n’est irréfléchi. En plus, c’est quelqu’un qui a énormément de culture et de conversation. Que vous lui parliez de technique, d'informatique ou même de politique internationale, ça peut durer des heures !

En quoi ça aide de rencontrer la personne dont on interprète le rôle, ça ne met pas trop la pression ?

Naturellement il y a de la pression. D’autant que lorsque l’on se glisse dans la peau d’une personne qui existe, on se sent aussi garant d’une certaine responsabilité. Pour autant, ça ne me gêne pas. Je trouve au contraire que c’est une formidable source d’inspiration. Lorsque l’on interprète un personnage fictif, nous devons réfléchir à tous les aspects de sa personnalité. Quand il s’agit de jouer un personnage existant, les sources et le travail sont bien différents.

Quelques années auparavant, vous aviez rencontré l’écrivain et funambule français Philippe Petit pour le film The Walk.

Effectivement. Je trouve qu’il est intéressant de faire un parallèle entre ces deux personnages. Tous deux ont pris des risques incommensurables pour aller au bout de leurs convictions. Petit pour accomplir l’exploit de son numéro de funambule entre les tours du World Trade Center et Snowden pour ses révélations au monde. Maintenant, je ne veux pas trop les comparer non plus, les deux personnages sont certes fascinants mais littéralement différents. Petit travaillait comme un artiste, Snowden lui, est un ingénieur. Mais encore une fois, ils ont fait preuve d’un courage inouï.

Pour ces deux films, vous vous êtes littéralement fondu dans la peau du personnage, si bien que l’on ne vous reconnaît même plus. Vous êtes un acteur-caméléon en quelque sorte !

Je suis ravi que vous ayez cette impression, je le prends comme un réel compliment. D’autant que les acteurs aujourd’hui que j’admire sont eux-même de réels caméléons Daniel Day-Lewis, Gary Oldman ou encore Christian Bale pour ne citer qu’eux. Pour moi, un acteur doit être fidèle à celui qu’il interprète au lieu de se mettre en avant. Se fondre, exister pour un autre, c’est ça être acteur !

1. November 2016

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