Review25. Februar 2019

« My Little One » - Rock, tendre et déroutant

«  My Little One » - Rock, tendre et déroutant
© Agora

Après « La Vraie Vie est Ailleurs », réalisé en tandem en 2006, Frédéric Choffat et Julie Gilbert co-signent « My Little One » ; un triptyque amoureux du désert fabuleusement teinté de la mélancolie du grand ouest Américain.

Le trio s’est aimé, il y a longtemps, éperdument, follement, jalousement. Dix ans se sont écoulés depuis leur dernier tango avec Jade (Anna Mouglalis), pourtant Alex (Vincent Bonillo) et Bernardo (Mathieu Demy) répondent en urgence à son appel et débarquent aux États-Unis, en plein territoire Navajo, pour rendre visite à leur Esmeralda Arizonienne. L’un quittera femme et enfants, l’autre les trois fois rien d’une vie fauchée par les amours d’antan. Jade a une fille (Ruby Matenko) et une nouvelle à leur annoncer.

Ouverture de sable et de vent, un bus s’arrête dans les entrailles vides d’un rêve américain. Alex et Bernardo se retrouvent au milieu de nulle part, un bel air de déjà-vu. Était-ce chez Kusturica, Gilliam, Wenders ou Jarmusch ? Mais pourtant, cette route, ce vertige, cette strie tatouée sur la peau rouge de l’Arizona … Ou alors une folie des frères Zellner ? Sottises, la chose est suisse ; un triptyque amoureux du désert signé de Frédéric Choffat et Julie Gilbert. Les deux globe-trotters réalisateurs conversent avec leurs vies pour nous ramener un conte initiatique. C'est en allant chercher un prix à Hollywood, pour leur précédent film, qu’ils découvrent l’Ouest américain, disent-ils. Le résultat est un ménage à trois aux accents beckettiens.

Anna Mouglalis, envoûtante et hypnotique...

Leurs conversations franco-anglaises ressemblent à celles d’Estragon et Wladimir dans la célèbre pièce. Leur Godot se nomme joliment Jade. Introuvable, insaisissable, une chimère beatnik qui rappelle Joan Baez, envoûtante sous les traits d’Anna Mouglalis, sublime lorsqu’elle chante. Lorsque le duo débarque pour la retrouver, rien ne laissait présager l'existence de la jeune Frida (Ruby Matenko) ni le nénuphar qui ronge sa mère. Des questions se posent alors sur la paternité et l’amour, du moins ce qu’il en reste. Ils avaient (presque) fait leur deuil. Dix années sans nouvelle, il y avait de quoi perdre patience.

Vincent Bonillo - My Little One (2018)

En filigrane toujours, une métaphysique triviale et romantique, l’absurde de l’existence et la petitesse des êtres. Aimer, à quoi bon ? La question est aimable, sinon facile, pourtant le scénario bercé par le rock de Yann Péchin (éternel acolyte d’Alain Bashung et Jacques Higelin) frétille et trouve des envolées psychées saturées à la Neil Young dans Deadman. Mathieu Demy et Vincent Bonillo s’y retrouvent avec douleur et pudeur. La jeune Ruby Matenko, elle, crève littéralement l’écran à l’image d’Anna Mouglalis, envoûtante et hypnotique. Un long-métrage certainement en deçà de ses pères et pourtant terriblement charmant.

En bref !

Voyage en Terre Navajo, Frédéric Choffat et Julie Gilbert, co-signent ici un triptyque amoureux aux envolées romantiques, poétiques et douloureuses. Une fable rock, tendre et déroutante.

3/5 ★

Plus d'informations sur My Little One.

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