Interview5. Januar 2018

«Le Grand Jeu» - Aaron Sorkin sur Metallica, le poker et Jessica Chastain !

«Le Grand Jeu» -  Aaron Sorkin sur Metallica, le poker et Jessica Chastain  !
© Aaron Sorkin Screenwriting Masterclass

En septembre dernier lors du Zürich Film Festival, nous avions rencontré le scénariste oscarisé, dramaturge et réalisateur Aaron Sorkin pour son premier film: Le Grand Jeu (Molly's Game). Il y recevait d'ailleurs un Career Achievement Award. Quelques minutes d'entretien nous furent accordées dans les luxueux locaux du Baur au Lac de Zürich. Le film est à découvrir depuis le 3 Janvier dans les salles romandes. Entretien réalisé par Théo Metais.

TM. Aaron Sorkin, merci de recevoir Cineman au Zurich Film Festival. Alors que le grand public vous connait principalement pour vos scénarios, vous signez ici votre premier film. Comment êtes-vous arrivé à la réalisation ?

AS. Tout d’abord, je dois avouer une chose. Quand j’ai écrit le script, l’idée de la réalisation ne m’a pas traversé l’esprit. C’est un ami qui m’a envoyé le bouquin de Molly. Un ami que nous avons en commun. Un ami qui la connait bien, elle et son histoire. Et j’ai absolument adoré le livre. C’était l'élément déclencheur. Molly est quelqu’un d'extrêmement convaincant, et une fois qu’elle m’a fait suffisamment confiance pour raconter toute son histoire, j’ai senti que nous avions entre les mains un élément de cinéma assez unique. J’ai eu la chance de pouvoir écrire cette histoire, et une fois terminée, la production m’a suggéré de la réaliser. En temps normal, j’essaie toujours de trouver le meilleur réalisateur pour adapter mes scénarios mais après en avoir longuement parlé, je me suis laissé convaincre que pour une fois, je pouvais peut-être être ce réalisateur.

«nous avions entre les mains un élément de cinéma assez unique...»

TM. Comment expliquez-vous qu’autant de célébrités ou de businessmen soient aussi accrocs au poker?

Vous savez, c’est encore un mystère pour moi. Personnellement, je ne joue pas au poker, cela m’ennuie, et je n’y comprends rien ! Dans le film, Molly en parle un peu, ou disons plutôt que c’est moi qui m’exprime au travers de Molly, mais toujours est-il qu’elle en parle. Par exemple, il y a ce type qui semble tout avoir, et pour lequel rien n’est plus attrayant que l’odeur de la victoire. Ce n’est pas l’argent qui les excite et pourtant je suis toujours étonné de voir à quel point ils sont fascinés par l’argent. Et puis, il y avait aussi cet acteur. Je ne vais pas dévoiler son nom mais il s’était fixé comme objectif de gagner plus d’argent au poker qu’à Hollywood en une année. Pour lui c’était juste un challenge, bon. Et puis il y a un truc de très masculin je suppose, quelque chose qui relève du danger. Mais là encore, je ne fais que supposer, je ne suis pas joueur.

TM. Pour Molly, la réussite à Hollywood est une affaire de solitude et d’égoïsme. Est-ce une conception du succès que vous pourriez partager?

AS. Hmm... Non je ne crois pas mais je comprends ce qui a rendu Molly particulièrement pessimiste. Vous savez, si vous pouviez la rencontrer, sans doute auriez-vous eu une approche différente. Elle a profité de ce succès! Elle a adoré ça. Ce n'était pas non plus tellement pour l’argent, ni même pour le glamour. Simplement, elle aimait l’idée d’être “quelqu’un”. Elle avait un nom et elle devenait importante. Je crois d’ailleurs que n’importe qui aurait adoré ça d’autant que la réussite était pour sa famille quelque chose de crucial. C’était un énorme challenge pour elle. Et puis, rapidement elle s’est plongée dans une solitude assez atroce de laquelle elle a fini par réchapper.

TM. Le personnage de Molly m’a fait penser à la chanson “Master of Puppets” de Metallica. Au fond, c’est elle la maitresse des jeux au milieu des pantins hollywoodiens. C’est l’histoire d’une ascension dévorante. On parle de drogue et de célébrité. Tout ça est profondément rock’n roll non?

AS. Alors, je n’en reviens pas que vous ayez mentionné Metallica! (rires) Pendant le tournage du film, j’avais pensé à cette chanson pour le montage final de quelques scènes. Et puis finalement... je me suis dit que c'était sans doute un peu prématuré. J’ai préféré laisser à l’équipe la possibilité de tester ce qu’elle voulait et de rester loin de certaines inspirations musicales. Mais c’est drôle d’avoir pensé à la même chose et j’en ai oublié la question (rires)!

«Elle a cette capacité à s’affranchir de la fatalité!»

TM. Et bien même si l’on parle de poker, j’ai trouvé le personnage Molly hautement rock’n roll.

AS. Vous savez, il y a une métaphore dans le film. Elle se dévoile à la fin. L’histoire commence et le déroulement de sa vie est quasiment planifié. On pourrait même trouver qu’elle a une vie sympa. Non pas confortable mais vertueuse. Elle ira en fac de droit, puis aux jeux olympiques, retour en fac de droit et ensuite elle travaillera avec une start-up afin de soutenir les femmes entrepreneurs. Tout roule impeccablement avant de s’envoler littéralement dans le décor 100 mètres avant la ligne d’arrivée. Mais elle se relève, et surpassera le désastre de cet accident. Elle a cette capacité à s’affranchir de la fatalité!

TM. Enfin, il y a une superbe alchimie entre le personnage de Jessica Chastain et les autres protagonistes. Comment l’avez vous intégrée au projet ?

AS. Je suis complètement d’accord. Jessica & Idris, Jessica & Kevin, les duos fonctionnent merveilleusement bien. Et même Jessica & Michael Cera, Jessica & Chris O’Dowd, et Jessica & Jeremy Strong. Pour le rôle de Molly, j’ai d’abord rencontré un nombre restreint d’actrices. Elles étaient toutes plus talentueuses les unes que les autres. Le plus dur était d’en sélectionner 5. La chose était quasiment insensée si ce n’est que la sixième était Jessica Chastain. Quand on s’est vu la première fois c’était génial! Après quelques plaisanteries sur le rôle et l’histoire, j’étais complètement séduit par son sens de l’humour. Ce que je recherchais avant tout, c’était une Molly avec de l'humour. Jessica a une répartie parfaitement drôle même si un peu maladroite parfois. Elle a cette capacité à vous faire rire de tout en une seconde et même sur des sujets délicats. Je me souviens quand je regardais The Help. Son personnage illuminait déjà l’écran à chacune de ses apparitions. C’est quelqu’un qui me fait rire dans la vrai vie comme à l’écran.

La bande-annonce

USA - 2017 - 133 Min. - Drama

Réalisateur: Aaron Sorkin

Acteur: Kevin Costner, Jessica Chastain, Idris Elba, Joe Kerry, Michael Cena

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