Review23. August 2021

«France» - Bruno Dumont s’empare du culte de la personnalité

«France» -  Bruno Dumont s’empare du culte de la personnalité
© Adok Films Sàrl

Présenté au dernier Festival de Cannes, le nouveau film de Bruno Dumont envoie Léa Seydoux au charbon, dans la peau d’une journaliste star sous le feu des critiques. La trajectoire d’une femme égocentrique dans une tragicomédie un poil molle.

« Tout ce théâtre à la con », soupire France de Meurs (Léa Seydoux). Dans France, l’égo d’une journaliste l’enverra dans de sales draps. À trop courir après l’audimat et le sensationnalisme, la reporter et présentatrice sombrera dans une crise existentielle au milieu d’une époque faite de narcissisme et de voyeurisme; une débâcle démultipliée par l’influence des réseaux sociaux et des médias.

Une émission « Un regard sur le monde », qu’on penserait tout droit tirée de « Cash Investigation » d’Élise Lucet. Des plateaux et des reportages sur le terrain, pour faire de l’audimat et faire pleurer dans les chaumières, quitte à transmuer la réalité en une grande farce orchestrée. Mais un détail est diablement important: France de Meurs est toujours le centre de l’attention, elle se donne le beau rôle et brille aux yeux des téléspectateurs. Son visage avant tout. Elle a bon dos l’intégrité journalistique. Les mensonges des médias, la grande supercherie pour sujet principal. Le monde des médias en prend pour son grade et Dumont dépeint une fresque qui définit le culte de la personnalité.

Un style assez étonnant, frôlant parfois le film «ovniesque»...– Sven Papaux

Léa Seydoux, correcte dans le rôle de France de Meurs, avance et s’enfonce dans le grand vide de la célébrité. Cernée par les lumières du show-business, la chute sera limpide, presque inévitable pour une femme qui ne pense qu’à elle, égocentrique et jouant avec la triste réalité d’autres individus. Bruno Dumont capte l’individualisme d’une femme censée parler des autres, mais préférant se mettre en avant. Dans un style assez étonnant, frôlant parfois le film « ovniesque » où la fantaisie se frotte à la crasse réalité, France est une diatribe du star-system. Un terrain de jeu rêvé pour son auteur, pour régler ses comptes avec l’actualité sensationnaliste.

«France» -  Bruno Dumont s’empare du culte de la personnalité
Léa Seydoux dans le film «France» © Adok Films Sàrl

Malheureusement, la satire a ses limites, et France souffre de ce délire de l’égo de plus de 125 minutes. Bruno Dumont s’évertue à se moquer d’un pays, d’un public, des « idiots utiles » qui s’abreuvent des infos d’« une belle utile ». Voilà le schéma. Le métrage se transforme en une jungle caricaturale et grotesque, phagocytant un début plutôt fluide et convaincant. Un pamphlet qui frise le ridicule et s’amusant à user d’acteurs et d’actrices presque inutiles dans un tel scénario. Les performances de Blanche Gardin, dans le rôle de l’assistante de France, et Benjamin Biolay, dans la peau du mari, sont tout simplement mauvaises, presque agaçantes. Mais à leur décharge, ces personnages sont mal écrits et manquent terriblement de nuance. Ce portrait qui décalque « cette France d’en haut » comme l’expliquait le cinéaste à Cannes, n’a que cette rage passagère et cette critique bien terne du narcissisme - et des réseaux sociaux - de notre époque.

3/5 ★

Le 25 août au cinéma. Plus d'informations sur «France».

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