Kritik13. Juli 2022

NIFFF 2022 : «Babysitter» - Une fée au pays des faux féministes

NIFFF 2022 : «Babysitter» - Une fée au pays des faux féministes
© NIFFF 2022

Deuxième réalisation de l’artiste québécoise Monia Chokri, «Babysitter» poursuit l’examen de la misogynie rampante dans les couples comme au travail avec un humour acerbe et une photographie ravissante.

(Critique d'Eleo Billet)

Cédric (Patrick Hivon) et Nadine (Monia Chokri) forment un couple bourgeois malheureux, car la communication est devenue impossible entre cris du bébé et valeurs irréconciliables. Quand Cédric est suspendu après avoir agressé sexuellement une journaliste en direct, le quarantenaire décide de faire l’étude de sa misogynie en écrivant un livre d’excuse avec son frère Jean-Michel (Steve Laplante), plus intéressé par la gloire et la séduction que la remise en question. Nadine, alors en dépression post-partum, cède à tout, même à l’arrivée d’Amy (Nadia Tereszkiewicz) dans leurs vies, une baby-sitter qui va s’immiscer dans le couple pour en révéler, ou réparer, les dernières fissures.

C’est avec une ouverture étouffante et suintant le «male gaze» (regard masculin), qui s’achève dans un bain de sang, que Monia Chokri choque et présente les thèmes phares de son film. De l’aliénation domestique d’une femme en congé maternité aux hommes cis qui se rêvent égéries du féminisme moderne sans pour autant perdre leurs privilèges, la réalisatrice et la scénariste Catherine Léger, qui adapte sa pièce de théâtre, dynamitent les couples de banlieue et leur confort surfait. Ce faisant, elles explorent les dynamiques putrides de domination des classes aisées en y incorporant l’horreur et le merveilleux. Les répliques fusent, les interprètes s’amusent et on en redemande.

Bien que chaque plan, du bain moussant au champ de coquelicots, pourrait être encadré, cette surenchère pour instaurer une atmosphère de conte amoindrit parfois la morale. Aussi, la parodie du concept sexiste de Lolita est impeccable lorsque Amy, la baby-sitter à l’univers pastel, se sait observée ou s’habille en soubrette. Mais lorsqu’elle est filmée comme objet et non plus sujet de désir et ne sert qu’à réconcilier le couple original, la métaphore s’effrite. Peut-être qu’une situation de départ moins cloisonnée aurait permis une analyse plus pointue du sexisme, mais tant que le rire et le malaise demeurent les objectifs premiers de cette comédie, nul doute qu’elle réussit son pari.

3,5 / 5 ★

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