Artikel18. November 2022

Jodorowsky, Massacre à la tronçonneuse et l'American Dream : 5 choses à retenir de la masterclass de Nicolas Winding Refn au GIFF

Jodorowsky, Massacre à la tronçonneuse et l'American Dream : 5 choses à retenir de la masterclass de Nicolas Winding Refn au GIFF
© GIFF 2022

A la suite de Xavier Dolan, Mads Mikkelsen ou encore Luca Guadagnino, le réalisateur danois Nicolas Winding Refn reçoit le prix Geneva Award du GIFF (Geneva International Film Festival) en parallèle d’une rétrospective de quelques-unes de ses œuvres les plus percutantes. Voilà en cinq points ce qu’il fallait retenir de sa masterclass dispensée pour le public du festival en direct de Copenhague.

(Un article de Kilian Junker depuis le GIFF 2022)

«Je suis un produit du rêve américain»

Après avoir grandi à Copenhague, Nicolas Winding Refn part très vite à New-York où naissent ses envies de cinéma. Venant du Danemark, il se remémore son «arrivée à Manhattan, où j’ai découvert le monde de la télévision». Il décrit comme l’un des moments les plus inspirants» de sa vie le fait d’avoir ce flux d’images à portée de main. Une expérience qu’il compare à «ce que font mes enfants avec les réseaux sociaux». Quelques années plus tard, «à quatorze ans, j’ai découvert «Massacre à la tronçonneuse»». «Quand je l’ai vu, j’ai réalisé que les films étaient une forme d’art», confie-t-il, et des possibilités infinies qu’offraient ce media, «mais aussi ce que les films pouvaient faire». L’œuvre «n’avait pas à avoir un sens, une philosophie, il suffit que ce soit une expérience».

«Lorsque j’ai fait mon premier film, je l’ai fait avec toute l’arrogance de la jeunesse».

De retour au Danemark, Nicolas Winding Refn réalise «Pusher». «J’ai toujours eu l’impression d’avoir eu des moments de ma vie où j’ai été extrêmement chanceux, et pouvoir réaliser «Pusher» était certainement l’un d’entre eux», confie-t-il. «J’avais 24 ans et (...) je me suis miraculeusement tourné vers un institut de cinéma pour me financer ». Il a ainsi pu apprendre en faisant, n’ayant pas les bases techniques de la réalisation. «C’est ce qui était fun à faire». Un film qui ouvre la porte à Winding Refn à d’autres réalisations, toujours dans un cinéma de genre plutôt sombre : «C’est comme avec Shakespeare, plus le drame est tragique, plus l’excitation est grande».

«J’essaie toujours de ne pas comprendre ce que je fais, ça en enlève le fun»

«Je filme toujours dans l’ordre chronologique, pour ne pas savoir comment cela va se terminer», confesse-t-il. Il ne souhaite pas prédire ce qu’il va produire, sa seule certitude est que «ce n’est pas ce que c’était censé être au départ». Il rajoute que beaucoup de ses films sont autobiographiques, c’est le cas notamment de «Bronson», «même s’il porte le nom de quelqu’un d’autre». Réagissant sur la violence de ce personnage, il ajoute en parlant de la créativité : «Il y a certainement une aptitude séduisante à tout détruire autour de nous». Une violence annihilatrice inhérente à l’inventivité, puis un besoin de reconstruction. «Je ne sais pas si c’est forcément négatif», ajoute-t-il. «C’est pour ça que la créativité fait office d’oxygène pour moi».

«L’industrie consomme le temps»

Réagissant à une citation d’Alejandro Jodorowsky (que le journaliste ne cite pas au hasard puisque le réalisateur danois lui a dédié plusieurs films) assénant que nous nageons dans une «mer d’excréments», Nicolas Winding Refn confirme que la plupart des contenus créés aujourd’hui «n’auraient pas besoin d’être produits». On continue pourtant à les fabriquer car «l’industrie consomme le temps» qui est pourtant l’un de nos biens les plus précieux. «Et lorsque l’on dépense du temps, on s’attend à avoir quelque chose en retour. Une expérience». Et selon lui, toute une partie de cette création «déborde tout simplement». «Ce qui subsiste, c’est ce qui est fait avec de la pureté, avec le cœur. Et la plupart des choses ne sont pas faites comme ça», ce n’est qu’un «terrible fastfood sans calorie». Et d’évoquer les algorithmes créés «pour un plaisir très superficiel», qui ne fait que «répéter ce qu’il sait déjà». «L’artiste doit être capable d’interpeller cette notion, ce qui n’est pas toujours évident». Et de dispenser l’un des conseils qui lui a été le plus utile en tant que jeune réalisateur, et qu’il répète volontiers aux aspirants cinéastes : «fais-le à ta manière».

«L’aumône est une partie de l’équation»

«J’en ai fait une règle, de parler à Jodorowsky avant de créer quelque chose. C’est arrivé pour Copenhaguen Cowboy notamment». Il concède avoir parfois «besoin d’aide pour débloquer sa créativité». Interrogé sur son processus de fabrication, il dit écrire ses idées sur des cartes, «et lorsque j’en ai assez je commence à voir une trame». A ce moment-là, il lui arrive d’appeler quelqu’un et de partager son idée, pour voir ce qu’il pourrait ajouter : «Je n’aime pas la solitude». Pas plus que de tout faire tout seul. «J’aime songer à l’idée et voir où ça me mène». Ensuite vient l’étape du financement, de «l’aumône» comme il le dit lui-même. «Il faut mentir. Prétendre. Manipuler», confesse-t-il, sinon rien ne se fera. «Il faut inspirer les gens pour qu’ils vous donnent de l’argent». «Le financement, c’est promettre tout ce qu’ils veulent entendre», alors qu’il concède ne jamais savoir à l’avance ce qu’il créera réellement au final.

Et de conclure sur la fonction du cinéma et du streaming. Il pense en effet qu’aujourd’hui, lorsque l’on crée, il faut non seulement que l’image soit percutante au cinéma, «mais aussi sur de plus petits écrans». «Bien sûr j’adore la salle de cinéma (...), mais la réalité c’est que ce n’est plus le propulseur de l’industrie».

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