Interview10. März 2023

Jennifer Devoldère: «A la fin du tournage, Karin Viard était capable d'accoucher une femme!»

Jennifer Devoldère: «A la fin du tournage, Karin Viard était capable d'accoucher une femme!»
© Frenetic Films AG

La réalisatrice Jennifer Devoldère a dirigé l’expérimentée Karin Viard et le novice Melvin Boomer pour son film «Sage-Homme». Rencontre.

(Marine Guillain, Alpe d’Huez)

Alors que Karin Viard présidait le jury du Festival de comédies de l’Alpe d’Huez (F), en janvier dernier, le film «Sage-Homme» était présenté en séance spéciale dans la station savoyarde. L’occasion de discuter avec la réalisatrice de ses comédien.ne.s, de la profession de sage-femme et des inégalités.

Cineman : Comment est née l’idée du scénario de «Sage-Homme»?

Jennifer Devoldère : On a eu cette idée de film sur un jeune homme qui raterait Médecine et qui entrerait à contre-cœur dans le monde des sages-femmes, qui serait dégouté d'être là, et qui découvrirait plein de choses. Au lieu que ce soit une femme qui doive réussir dans un monde d'hommes, je cherchais une problématique inversée, et le milieu de la maternité s'est vite imposé comme l'endroit où le féminin a la plus grande place.

Justement, connaissiez-vous cet univers?

J'ai moi-même accouché et mon beau-père travaillait en maternité donc j'avais une vague idée, mais ça restait superficiel. On s'est énormément renseignés pour le film. On a fait des stages en milieu hospitalier au moment de l'écriture et c'est comme ça qu'on a glané plein d'informations. On a rencontré des hommes sage-femmes, qui nous ont raconté leur parcours. Si j’ai bien les chiffres en tête, moins de 4% de sages-femmes sont des hommes en France, et si l’on regarde chez les plus de 45 ans, ils sont 0%.

Comment s’est construit le casting?

J'ai toujours eu Karin Viard en tête, on a écrit pour elle, je me suis inspirée de qui elle est dans la vie pour créer ce personnage très libre de Nathalie, sage-femme expérimentée qui prend le jeune Léopold sous son aile. On l'a sollicitée à la fin de l'écriture et je suis très contente qu'elle ait accepté. Pour le rôle de Léopold, on a vu environ 200 garçons. Melvin Boomer est l'un des premiers à avoir passé le casting. La série «Le monde de demain» n'était pas encore sortie donc je ne l'avais jamais vu à l'écran. Je l'ai fait revenir plusieurs fois. Lorsqu’il a rencontré Karin, ça a super bien fonctionné et j'ai su que ce serait lui. On ne sait pas toujours ce qui crée l'alchimie entre les gens, pourquoi ça «clique», cinématographiquement parlant, mais Karin et Melvin se complètent vraiment bien.

Jennifer Devoldère: «A la fin du tournage, Karin Viard était capable d'accoucher une femme!»
Melvin Boomer dans «Sage-Homme» © 2022 Karé Productions - France 2 Cinéma - Marvelous Productions

Les avez-vous dirigé de la même façon?

Non, on ne peut pas, c'est très différent. Melvin est arrivé tout neuf, il est de toutes les séquences, c'est vraiment un film sur son personnage, il avait besoin d’être accompagné. Karin, elle, c'est la patronne! Elle a tellement d'expérience, elle est rapide, elle comprend tout et elle n'aime pas qu'on donne trop d'indications. Mais de toute façon, on ne peut diriger aucun acteur de la même façon qu'un autre.

Comment se sont-ils familiarisés avec le milieu hospitalier?

Tous deux ont fait un stage à Paris, auprès d'une sage-femme très expérimentée à la forte personnalité. Ils ont assisté à des accouchements. Karin a continué ensuite avec une sage-femme qui lui a montré tous les gestes. Elle les répétait avant chaque scène pour qu’elle parvienne à être très précise, tout en jouant la comédie. Maintenant, je pense qu'elle a oublié, mais à la fin du tournage, elle était capable d'accoucher une femme.

«Sage-Homme» navigue un peu entre la comédie et le drame…

Oui, c’est vraiment un mélange des deux. C'est avant tout un film initiatique, un «coming of age», l'histoire d'un garçon qui va devenir un homme. Il passe par beaucoup d'émotions. Il y a aussi des moments drôles et des drames dans le film. La maternité est un endroit où la vie et la mort se côtoient sans cesse et on a voulu montrer ça. Donc en bref, c’est une comédie dramatique initiatique!

Jennifer Devoldère: «A la fin du tournage, Karin Viard était capable d'accoucher une femme!»
Karin Viard dans «Sage-Homme» © 2022 Karé Productions - France 2 Cinéma - Marvelous Productions

Mettre en avant le métier de sage-femme et lui rendre hommage était-il essentiel pour vous?

Je voulais réhabiliter ces gens, évidemment. Le prestige, c'est d'être médecin, c'est lui le patron, ceux qui sont derrière, on les voit moins. Pourtant, il y a des femmes qui donnent énormément pour que les choses fonctionnent à peu près, même s'il y a beaucoup de difficultés, puisque aujourd'hui, l'hôpital est vraiment sous tension. Elles vivent beaucoup d'émotions au cours de leurs journées, des choses parfois très belles, parfois très dures, et quand elles rentrent chez elles, elles ne peuvent pas toujours le partager. Elles sont un peu seules. Il s’agit d’une vraie vocation, car on ne gagne pas assez et on n'est pas très reconnu...

Est-ce en train d’évoluer?

C'est en train de changer, oui, elles se rebellent, mais c'est arrivé tard. Je pense que la raison est liée au fait que ce soit à la base un métier de femmes. Les professions majoritairement féminines sont généralement moins reconnues que les autres.

À découvrir au cinéma à partir du 15 mars.

Plus d'informations sur «Sage-Homme».

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