Kritik5. Dezember 2018

«Jazz, the Only Way of Life» - Jacques Muyal, itinéraire d’un enfant du Jazz

«Jazz, the Only Way of Life» - Jacques Muyal, itinéraire d’un enfant du Jazz
© Aardvark Film Emporium

Nouveau film documentaire de Jacques Matthey, le réalisateur de La Béroche brosse le portrait d’une figure emblématique du jazz, d’un passionné d'exception, Jacques Muyal, et de sa fidèle et tendre amitié avec Dizzy Gillespie.

Passionné invétéré de musique jazz, la vie de Jacques Muyal est une épopée d’un autre temps commencée à Tanger. En 1952, le jeune adolescent découvre le jazz sur les ondes de “Voice of America” et l’émission “Jazz Hour” de Willis Connover. Transcendé par cette musique, il deviendra lui-même animateur de sa propre émission dès l’âge de 15 ans. Très vite, Jacques se fait un nom. Dans les rues de Tanger, il rencontre Idrees Sulieman, se lie d’amitié avec Randy Weston et commence à produire des disques. Plus tard, il croise la route de l’illustre musicien Dizzy Gillespie pour une amitié éternelle et magnifiée jusque dans le porter de cercueil à la mort du trompettiste en 1993. Producteur, ami, groupie, fidèle et avant-gardiste, Jacques est un homme discret mais son nom appartient à l’histoire.

Nouveau film de Jacques Matthey, l’ancien des archives audiovisuelles du Montreux Jazz Festival brosse ici le portrait intimiste d’une figure méconnue de la scène jazz. Tapi dans l’ombre des musiciens et aujourd’hui âgé de 77 ans, peu connaissent son histoire. De Tanger à Brooklyn jusqu’au lac Léman, Jacques Muyal a consacré sa vie à l’éclectisme du jazz, côtoyé les plus grands et produit certains des albums les plus influents. Illustre mélomane devant l’histoire, un documentaire sur Jacques Muyal, « le seul musicien de jazz qui ne joue d’aucun instrument » (selon Paquito D’Rivera), témoigne une nouvelle fois du magnétisme du jazz dans les contrées helvétiques et de sa résonance au cinéma. La renommée du Montreux Jazz Festival n’est plus à faire (Muyal y invitera d’ailleurs Randy Weston et son African Rhythm Orchestra en 1985) et la réalisatrice bernoise Sophie Huber consacrait récemment un excellent documentaire à l’histoire du label Blue Note (Blue Note Records: Beyond the Notes).

Le portrait intimiste d’une figure méconnue...

Ici et sur un format court d’1h10, bercé d’archives, d’anecdotes, d’entretiens et de captations lives, le réalisateur tente une approche intime et délicate de l’histoire. Randy Weston le dira lui-même, voir un documentaire sur Jacques, c’est voir de « l’amour à l’état-pur ». Pas si sûr, en tout cas sur la forme … Très curieusement, Jazz the only way of life ne rapporte que des perles infimes de l'histoire du jazz à laquelle Jacques s’est greffé. Le personnage ne sera que faiblement dévoilé, et ne s’envole jamais au-delà de ce qui a déjà été dit, ou écrit, sur le sujet. Perturbé par une mouture d’une étrange simplicité, voir hasardeuse (on notera des séquences coupées à la cuillère dans les interviews), le documentaire manque de verve, de charisme et de cinématographie.

© Aardvark Film Emporium

On s’étonnera aussi des anecdotes de sa femme et de son fils, dépassionnées et cantonnées à des banalités assez évidentes sur leur vie. Muyal n’est pas non plus très à l’aise dans l’exercice de son propre récit. Lui comme ses proches et les musiciens, tous semblent déstabilisés par les questions (parfois hors-champ), à l’image de cet échange : « Pourquoi n’as-tu pas fait de ta passion ton métier ? - Mon métier unique tu veux dire ? », comme si les deux Jacques ne s’étaient jamais compris …

C’est finalement quand Jazz the only way of life décentre son sujet principal et laisse la parole à Muyal, au travers de ses archives vidéos, que le métrage se dore de moments précieux et embrasse cette nécessité de documentation pour l’avenir dont parle Randy Weston. Il faudra voir cette séquence chez Dizzy Gillespie à Englewood dans le New Jersey, le jazzman se confie sur Charlie Parker, le bebop et le jazz moderne, passionnant !

© Aardvark Film Emporium

En bref !

Il y avait ici l’envie de rendre un hommage à quelques-unes des figures emblématiques de l’histoire du jazz. Précipité et sans doute trop récent, le film manque de distance et de substance pour réellement captiver (et ce malgré son format court). Aussi inspirante soit la vie de Jacques Muyal, les axes narratifs pourront laisser perplexes. Sans doute aurait-il fallu laisser les protagonistes s’exprimer autrement qu'au travers des questions du réalisateur et des morceaux choisis.

2,5/5 ★

Plus d'informations sur Jazz, the Only Way of Life.

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