Kritik9. Oktober 2019

«For Sama» - Documentaire foudroyant, naissance parmi les bombes

«For Sama» - Documentaire foudroyant, naissance parmi les bombes
© trigon-film

En compétition cette année à Cannes, «For Sama» nous immerge comme rarement dans Alep. De 2011 à 2016, Waad al-Kateab se faufile entre les bombes, entre les blessés, la misère. Un documentaire foudroyant, dédié à sa fille Sama.

Le régime de Bachar el-Assad en a fait des victimes. La Syrie rebelle est écartelée par la guerre dès 2011, là où les étudiants de «l’Université de la liberté d’Alep», comme la nomme Waad, sont acculés par les bombes. Waad, journaliste, et son mari Hamza, médecin, donnent naissance à Sama. Pourquoi donner la vie alors que le pays est bientôt un no man’s land? Waad y répond à travers des reflets filmés, à travers les bombes et les morts. Derrière sa petite caméra, voire un premier temps derrière son téléphone portable, la jeune femme met en exergue cette brutalité inhumaine.

Ses parents lui disaient qu’elle était têtue, parfois inconsciente. Waad ne comprenait pas pourquoi ses géniteurs la voyaient ainsi. Alors c’est sa progéniture qui s’en est chargée, comme elle le souligne. Sama, qui signifie «ciel» en arabe, lui octroie un moment d’intense bonheur alors que la ville s’écroule sous les impacts d’obus. La guerre fait rage, mais les habitants refusent d’abandonner le navire. Ils se démènent, se serrent les coudes, construisent un hôpital de fortune, celui où Hamza opère et se bat pour garder des centaines de victimes en vie. La vie continue malgré les horreurs. «For Sama» est avant tout une lettre ouverte de Waad à sa fille, une réponse à l’équation de sa naissance: pourquoi donner la vie alors qu’elle déserte les rues d’Alep? Pourquoi la mettre au monde alors qu’il est impossible à vivre. La naissance face au déclin. Le bonheur face à la brutalité froide de l’Homme. Des milliers de Syriens innocents, victimes collatérales d’un régime.

«Une immersion musclée, renversante, tragique...»– Sven Papaux

Vous sentez le souffle de la déflagration, le parfum de la désolation exhaler une brise de souffrance. L’espoir terrassé par les bombes, par la mort. «On n’a pas le temps de faire son deuil», déplore Waad. Alep croule sous les explosions. Les habitants en viennent même à occulter les impacts, le bruit assourdissant d’un obus qui frappe le sol. Tout n’est que poussière et décombres. Les traînées de sang, les blessés, les morts, les enfants passés à trépas, Waad al-Kateab le filme, le capte dans sa forme la plus authentique. Une immersion musclée, renversante, tragique. Des sépulcres blanchis par les bombes. Un pays détruit. «C’est beau d’avoir le mot liberté écrit sur le visage» murmure un infirmier qui assiste Hamza, face à la caméra de Waad. Une phrase symbolique pour un documentaire singulier.

En bref!

La force de «For Sama» réside dans l’angle abordé par Waad al-Kateab. Une lettre ouverte pour sa fille, où espoir et détresse se collisionnent. Une ode au courage, une percée affolante de violence où la vie pousse tant bien que mal tel un arbre de vie. Même derrière le désespoir, une lumière persiste.

4,5/5 ★

Plus d'informations sur «For Sama». Au cinéma dès aujourd'hui.

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